ad initium

Gn 1, 2

1071 Denique non cantat sed gemit columba donum timoris significans. quo referti homines pii lachrymarum fontibus rigantur peccata gemitibus et singultibus diluentes. Ita enim Esaias Rugiemus inquit quasi ursi omnes: et quasi columbae meditanter gememus. Paulus quoque ad Romanos scribens: Ipse spiritus sanctus postulat pro nobis gemitibus inenarrabilibus. Nec uidetur dissimilis ratio: cum spiritus sanctus in christi metamorphosi in specie nubis, apparuit denotans scilicet abundantiam lachrymarum. Nam spiritus domini ferebatur super aquas: Et psalmographus quoque flabit inquit spiritus eius et fluent aquae. sicut enim aduentu austri in imbres nubes pluuia grauatae resoluuntur: sic spiritu sancto accedente propius atque ingrediente mentes pias lachrymae funduntur uberrimae. Hinc in canticis legimus surge aquilo et ueni auster: perfla hortum meum et fluant aromata illius: hoc est suaue olentissimae lachrymae. Caeterum quid sit de felle columbae dicendum suo in loco hoc est in. xvi. huius primi libri sectione aperiam Pour finir, la colombe ne chante pas mais gémit, signifiant ainsi le don de crainte de Dieu ; quand ils en sont remplis, les gens pieux sont baignés de flots de larmes, en lavant leurs péchés dans les gémissements et les sanglots. Ainsi en effet dit Isaïe : "nous gronderons tous comme des ours et comme des colombes, quand nous réfléchirons, nous gémirons" ; Paul aussi, dans la lettre aux Romains, dit : "l’Esprit saint lui-même demande en notre faveur en des gémissements inexprimables". Et la raison ne semble pas différente quand l’Esprit saint est apparu dans la transfiguration du Christ sous la forme d’une nuée, indiquant ainsi évidemment une abondance de larmes. De fait, "l’Esprit du Seigneur planait sur les eaux", et le psalmiste dit aussi "son esprit soufflera et les eaux couleront" ; en effet comme, à l’arrivée de l’Auster, les nuées lourdes de pluie éclatent en averses, de même, à la venue proche de l’Esprit saint et au moment où il pénètre les esprits pieux, les larmes coulent en grande abondance. C’est ce qui fait que nous lisons dans le Cantique : "lève-toi, Aquilon, viens, Auster, souffle sur mon jardin et que coulent ses parfums", autrement dit les larmes aux parfums les plus suaves. En outre ce qu’il faut dire du fiel de la colombe, il nous faudra l’expliquer en son lieu et place, autrement dit au point 16 de ce premier livre.

1852 Vnde moses: spiritus inquit domini ferebatur super aquas: hoc est super omnia fluxa ac mobilia creata: ipsis esse spirando: et eas uiuificando. C'est ce qui fait que Moïse dit : "l'Esprit de Dieu planait sur les eaux", autrement dit sur tout ce qui a été créé fluctuant et mobile, leur accordant l'être par spiration et les vivifiant.

2122 Vt ergo propheta: ait: deus creauit omnes res ipsas nominando. dixit enim fiat lux: et facta est lux. dixit quoque deus. fiat firmamentum et germinet terra herbam uirentem: et facientem semen: et lignum pomiferum: et faciens fructum iuxta genus suum: et factum est ita. dixit quoque deus: fiant luminaria. producant aquæ reptile animæ uiuentis: et uolatile super terram etc. Donc, comme le prophète le dit, Dieu créa toute chose en la nommant ; il dit en effet "que le lumière soit et la lumière fut", et Dieu dit : "qu'il y ait un firmament, que la terre fasse germer l'herbe verdoyante et qui produit sa semence, et l'arbre fruitier qui produit du fruit selon son espèce et il en fut ainsi" ; Dieu dit aussi : "qu'il y ait des luminaires que les eaux produisent les reptiles vivants et les oiseaux sur la terre" etc.

2125 (Cum fierent) scilicet res a deo ut stellæ: luminaria: formæ et species uariorum animatorum: uox id est uerbum dei dicentis fiat lux: fiat firmamentum. ergo uox id est locutio dei: erat semen id est principium et causa rerum creatarum. (Cum fierent ("comme elles étaient faites")) évidemment les choses par Dieu, comme les étoiles, les luminaires, les formes et les espèces des divers êtres animés ; uox ("la voix") autrement dit celle de Dieu qui prononce la parole "que la lumière soit", "qu'il y ait un firmament" ; donc uox ("la voix") autrement dit la prise de parole de Dieu, erat semen ("était semence"), autrement dit principe et cause des choses créées.

2133 Cum enim dixit deus: fiat lux: intelligimus in uerbo esse ut fieret. Quand en effet Dieu dit : "que la lumière soit", nous comprenons que ce qui est dans la parole, c'est qu'elle soit faite.

2140 Vnde paulo supra: idem eminentissimus ac sublimis uates: et spiritus inquit domini ferebatur super aquas. De là vient qu'un peu plus haut le très éminent et sublime prophète a dit : "et l'Esprit du Seigneur planait sur les eaux".

2239 Fuit autem in diebus sequentibus et cœlorum: et elementorum: per formas specificas facta ab æterno opifice distinctio: cum dixit per uerbum suum: fiat lux. et in primo die de illa materia communi: formam lucis creauit: et condidit. Il y eut, dans les jours suivants, distinction par l'artisan éternel du ciel et des éléments par leurs formes spécifiques, quand il dit par son verbe : "que la lumière soit", et, le premier jour, à partir de la matière commune, il créa la forme de la lumière, et l'établit.

2310 Cæterum considerandum est id quod in genesi propheta scripsit: Et spiritus dei ferebatur super aquas id est super illam ductilem ac fluidam tractabilemque congeriem ac materiam: unde deus et spiritus oris diuini: quia dat rebus uitam: motum: et esse: atque operationem: curuauit æthera id est cœlum curuum fecit: et ex omni parte deorsum inclinantem: et conuexum: quemadmodum et Vates egregius descripsit: aspice (inquit) conuexo nutantem pondere mundum. Il faut, en outre, prêter attention à ce que le prophète a écrit dans la Genèse : "et l'Esprit de Dieu planait sur les eaux" autrement dit sur cette masse et cette matière ductile, fluide et aisément manipulable, d'où Dieu et spiritus oris ("le souffle de sa bouche") divine parce qu'il donne aux choses vie, mouvement, être et opération, curuauit aethera ("courba l'éther") autrement dit rendit courbe le ciel, qu'il fit s'incliner vers le bas dans toutes ses limites et rendit convexe, ainsi que le dit le Poète admirable : "regarde le monde qui s'incline sous le poids de la masse convexe".