382 (Sine semine) quia non concepit uirgo maria christum humano modo sed diuino: nec uirtute seminis uirilis sed uirtute spiritus sancti: Sicut ei dixit angelus: spiritus scilicet superueniet in te. (Sine semine) parce que la Vierge Marie n’a pas conçu le Christ de manière humaine, mais bien divine, et non selon la puissance d’une semence masculine, mais selon la puissance de l’Esprit saint, comme le lui a dit l’ange : évidemment "l’Esprit saint viendra sur toi".
383 spiritus enim sanctus superueniens in uirginem: mentem pariter et uterum eius sanctificauit ut coelesti esset digna partui. En effet, l’Esprit saint, venant sur la Vierge, sanctifia son esprit comme son ventre pour qu’elle fût digne d’un enfantement céleste.
384 Idem quoque spiritus scilicet e carne uirginis et membris ac purisimis sanguinibus corpus redemptoris in utero eius sua operatione formauit. C’est aussi ce même Esprit évidemment qui forma par son action, de la chair de la Vierge et de ses membres et de son sang très pur, le corps du Rédempteur dans son ventre.
385 Non enim per apertionem claustri uirginei: nec per uiri semen sed per spiritus sancti uirtutem maria uirgo concepit. C’est non pas en effet en déchirant la barrière de sa virginité, ni par l’intermédiaire de la semence d’un homme que la Vierge Marie conçut, mais par la puissance de l’Esprit saint.
386 unde a graecis christus redemptor apator et ametor nuncupatur: quoniam secundum typum melchisedech et ordinem: Iesus liberator ut matrem in illa diuina generatione nesciuit: ita patrem in humana conceptione ignorauit: ex patre solo natus ante sæcula: Ex uirgine sola ortus in hoc sæculo. C’est la raison pour laquelle les Grecs nomment le Christ rédempteur ἀπάτωρ ("sans père") et ἀμήτωρ ("sans mère") puisque, selon le type et l’ordre de Melchisédec, Jésus le libérateur de même qu’il ne connut pas la maternité dans son engendrement divin, de même ignora la paternité dans sa conception humaine, né du seul Père avant les siècles, issu de la seule Vierge dans ce siècle.
387 dicit autem Arator: hoc quod accepit a uirgine matre passum fuisse et datum pro stirpe humana. quia diuinitas est impatibilis. unde de humanitate sua christus loquens: quia inquit repleta est malis anima mea et uita mea in inferno appropinquauit. Arator dit : ce qu’il a reçu de la Vierge, sa mère, a souffert la passion et a été donné pro stirpe humana ("au bénéfice de l’humanité"), parce que sa divinité est impassible ; de là vient que c’est en parlant de son humanité que le Christ dit : "mon âme est pleine de maux" et ma vie a approché de l’enfer.
389 Quare firmiter credimus uerbum dei: per quod omnia facta sunt: sic assumpsisse mortale corpus ex uirgine: ut inmortalitatem suam moriendo non corruperit: ut æternitatem suam temporarie nascendo non mutauerit: ut potestatem suam suis inimicis se offerendo et subdendo non minuerit: ut administrationem mundi in hierusalem prædicando non deseruerit: ut a sinu patris id est a secreto. quo cum illo et in illo est. quandiu in utero uirginis et in hac uita mortali fuit: non recesserit. C’est pourquoi nous croyons fermement que le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, a pris un corps mortel de la Vierge, de telle sorte qu’en mourant il ne vînt pas corrompre son immortalité, qu’en naissant dans le temps il ne changeât rien à son immortalité, qu’en se livrant et en se soumettant à ses adversaires il ne diminuât en rien sa puissance, qu’en prêchant à Jérusalem il n’abandonnât nullement son gouvernement du monde, qu’il ne quittât pas le sein du père, autrement dit le lieu secret où il est avec lui et en lui, aussi longtemps qu’il fut dans le sein de la Vierge et dans cette vie mortelle.
458 Verissime igitur apostolus christum uocat primitias quia primus fuit tempore: et maximus dignitate. hinc mox dixit: alia claritas solis id est christi: alia lunæ id est deiperae uirginis: et alia claritas stellarum id est sanctorum. stella enim a stella differt in claritate:sic et resurrectio mortuorum. C’est donc en toute vérité que l’Apôtre appelle le Christ prémice car il fut le premier dans le temps et le plus grand en dignité ; peu après c’est ainsi qu’il dit "une chose est la clarté du soleil", autrement dit le Christ, "une autre celle de la lune", autrement dit la Vierge Mère de Dieu, "une autre encore celle des étoiles" autrement dit des saints. "Une étoile en effet diffère d’une autre en clarté, il en est ainsi de la résurrection des morts".
556 ostendit autem in hac secunda sectione Arator christum multis signis probasse discipulis se post resurrectionem idem habere corpus quod ante habuisset. deinde post. xxxx. dies e monte oliueto assumptum fuisse in coelum illis uidentibus et mirantibus. postea uero dicipulos rediisse hierosolymam: ubi uirgo deipara erat. Dans cette deuxième section, Arator montre que le Christ, par de nombreux signes, a prouvé à ses disciples qu’après sa résurrection il avait le même corps qu’il avait eu auparavant ; ensuite qu’après quarante jours il fut enlevé au ciel depuis le Mont des Oliviers, tandis qu’ils le voyaient et s’en émerveillaient ; et qu’ensuite les disciples étaient revenus à Jérusalem où était la Vierge Mère de Dieu.
708 sciendum apsotolos ipsos rediisse in hierusalem post admonitionem angelorum: et ascendisse in coenaculum ut narrat beatus lucas: in quo erat mater domini cum mulieribus quae ipsam comitabantur: et Iesum a galilea in hierusalem secutae fuerant religionis ac pietatis obsequio: Verum cum statim dominus fixus cruci fuisset: mulieres deiperam mariam postea non dereliquerunt. Il faut savoir que les apôtres eux-mêmes revinrent à Jérusalem après l’admonition des anges, et qu’ils montèrent dans le cénacle, comme le raconte le bienheureux Luc, dans lequel se trouvait la mère du Seigneur avec les femmes qui accompagnaient celle-ci, et qui avaient suivi Jésus de la Galilée à Jérusalem pour obéir aux règles de la religion et de la piété ; mais dès que le Seigneur eut été fixé à la croix, les femmes ne quittèrent pas Marie la mère de Dieu.
708 sciendum apsotolos ipsos rediisse in hierusalem post admonitionem angelorum: et ascendisse in coenaculum ut narrat beatus lucas: in quo erat mater domini cum mulieribus quae ipsam comitabantur: et Iesum a galilea in hierusalem secutae fuerant religionis ac pietatis obsequio: Verum cum statim dominus fixus cruci fuisset: mulieres deiperam mariam postea non dereliquerunt. Il faut savoir que les apôtres eux-mêmes revinrent à Jérusalem après l’admonition des anges, et qu’ils montèrent dans le cénacle, comme le raconte le bienheureux Luc, dans lequel se trouvait la mère du Seigneur avec les femmes qui accompagnaient celle-ci, et qui avaient suivi Jésus de la Galilée à Jérusalem pour obéir aux règles de la religion et de la piété ; mais dès que le Seigneur eut été fixé à la croix, les femmes ne quittèrent pas Marie la mère de Dieu.
709 cum ergo in hanc narrationem incidisset Arator: nactus occasionem diuertendi in laudes uirginis: columbellam illam candidissimam et omni prorsus uacantem labe digno praeconio sequitur: non ignarus totum ad laudem eius pertinere: qui matrem sibi talem delegit: quicquid dignum genitrici suae impensum fuerit. Comme donc Arator en était arrivé à ce point de son récit, il saisit l’occasion de faire une digression pour louer la vierge ; il suit cette petite colombe d’une blancheur parfaite et qui est dépourvue d’absolument toute tache avec l’éloge qu’elle mérite, car il sait bien que tout ce que tout effort digne de sa mère concourt à la louange de celui qui s’est choisi une telle mère.
710 Laudat autem ipsam a uirginitate quae foecunditati coniuncta in sola maria repperitur. deinde ostendit omne illud quod eua tristis astulit: per mariam restitutum: cum terris deum pacemque refudit. cum nobis redemptorem peperit qui in crucis patibulo expressus terris omnibus pluuiam salutis effudit et stillicidia gratiae humanis mentibus praestare ubertim dignatus est. Il la loue de sa virginité qui, jointe à la fécondité, ne se rencontre que dans la seule Marie. Ensuite il montre ce que la funeste Eve a enlevé et qui est restitué par Marie, car elle rendit à la terre Dieu et la paix ; quand elle engendra pour nous le rédempteur qui, pressé sur le gibet de la croix, versa pour toute la terre la pluie du salut et daigna offrir abondamment à l’esprit humain les gouttes de sa grâce.
710 Laudat autem ipsam a uirginitate quae foecunditati coniuncta in sola maria repperitur. deinde ostendit omne illud quod eua tristis astulit: per mariam restitutum: cum terris deum pacemque refudit. cum nobis redemptorem peperit qui in crucis patibulo expressus terris omnibus pluuiam salutis effudit et stillicidia gratiae humanis mentibus praestare ubertim dignatus est. Il la loue de sa virginité qui, jointe à la fécondité, ne se rencontre que dans la seule Marie. Ensuite il montre ce que la funeste Eve a enlevé et qui est restitué par Marie, car elle rendit à la terre Dieu et la paix ; quand elle engendra pour nous le rédempteur qui, pressé sur le gibet de la croix, versa pour toute la terre la pluie du salut et daigna offrir abondamment à l’esprit humain les gouttes de sa grâce.
711 dicitur autem maria porta dei: uelut canit ecclesia regis alti ianua: quia sicut homo per portam exit et intrat: sic christus deus intrauit e exiuit per illam: clausa semper manente porta: et ad ingressum et regressum summi regis integritate uirginea inefabiliter custodita: secundum illud Ezechielis: porta haec clausa erit: et non aperietur. et uir non transiuit per eam. quoniam dominus deus israel ingressus est per eam. Marie est dite porta dei ("porte de Dieu"), comme le chante l’Église porte du roi très-haut, parce que, de même que l’homme sort et entre par une porte, de même c’est par elle que le Christ entra et sortit, alors que la porte demeurait toujours close, et gardée de manière ineffable dans son intégrité virginale pour l’entrée et la sortie du roi très-haut, selon cette parole d’Ezéchiel : "cette porte sera fermée et ne sera pas ouverte ; et l’homme ne passera pas par elle, car le Seigneur, Dieu d’Israël, est entré par elle".
712 aliter dicitur porta coeli uel lanua paradisi: quoniam meritis illius coelum ingredimur: quae per albentia lilia rosasque uernantes ad fontem perennis uitae nos inuitat: in illa beatorum felicissima regione primi ordinis dignitatem adepta: quaeque plantis roscidis oberrans: inter paradisi amoenitates chorosque gramineos uiolas immarcessibiles carpit. On peut aussi autrement la qualifier de porte du ciel et de porte du paradis, puisque c’est par ses mérites que nous entrons au ciel ; c’est elle qui nous invite vers la source de vie éternelle au travers des lis blancs, des roses en fleurs et, dans cette région de félicité absolue où vivent les bienheureux, elle s’est acquise la dignité de la première place, et, se promenant au milieu de plantes couvertes de rosée au milieu des charmes du paradis et des choeurs de gazon, cueille des violettes qui jamais ne se fanent.
714 Sed quo me incautum deducit pietas: qui in transcursu et aliud agens uolo O uirgo decus coeli: tuarum laudum titulos breui summa complecti: perinde ac si parua concha fluctus oceani totos cuperem exhauriri. Mais où me conduit la piété dans mon imprudence, moi qui ne fais que passer sur ce sujet et désire faire autre chose : ô vierge ornement du ciel, je voudrais embrasser tous tes titres dans un bref sommaire, exactement comme si avec un petit coquillage je tentais de puiser tout les flots de l’océan.
716 Non igitur miremur si poeta christianus libenter ad celebrandos Nymphae palestinae deiperaeque uirginis titulos digreditur: non nescius scilicet honorem maternum eius esse: qui est natus ex ea quem omnis coelorum ordo et potestas ueneratur: atque adorat: Ne nous étonnons donc pas si le poète chrétien fait volontiers une digression pour célébrer les titres de la nymphe de Palestine et de la vierge mère de Dieu, sans ignorer évidemment que l’honneur que l’on rend à sa mère se reporte sur celui qui est né d’elle et que toute la hiérarchie et la puissance célestes vénèrent et adorent.
719 Debemus autem oculis uigilantibus perspicere id quod lucas in primo actuum capite: et Arator hic refert illle namque dixit apostolos reuersos fuisse in hierusalem: et omnes perseuerasse unanimiter in oratione cum mulieribus et maria matre lesu. Nous devons donc garder le regard en éveil pour bien voir ce que Luc en Ac. 1 et ici Arator rapportent : de fait, il dit que les apôtres sont revenus à Jérusalem et que tous ils ont unanimement persévété dans la prière avec les femmes et Marie la mère de Jésus.
720 Hic autem moenia (inquit) nota petunt: qua tunc statione sedebat porta maria dei. omnes enim discipuli ad ipsam uirginem recurrebant tanquam ad fontem sapientiae uberrimum: Hanc super dubiis quaestionibus uelut arcam diuinorum mysterorum adibant: hoc illis adytum erat: hoc arcanorum coelestium sacrarium atque oraculum habebatur. Ici il dit moenia nota petunt qua tunc statione sedebat porta maria dei ("ils se dirigent vers les remparts familiers, où résidait alors Marie, la porte de Dieu") ; tous les disciples en effet recouraient à la vierge elle-même comme à la très abondante fontaine de sagesse ; ils allaient la voir au sujet de toutes les questions en suspens comme à une arche de divins mystères ; elle était pour eux le moyen d’y accéder et cela était pour eux la sanctuaire des secrets célestes et un oracle.
720 Hic autem moenia (inquit) nota petunt: qua tunc statione sedebat porta maria dei. omnes enim discipuli ad ipsam uirginem recurrebant tanquam ad fontem sapientiae uberrimum: Hanc super dubiis quaestionibus uelut arcam diuinorum mysterorum adibant: hoc illis adytum erat: hoc arcanorum coelestium sacrarium atque oraculum habebatur. Ici il dit moenia nota petunt qua tunc statione sedebat porta maria dei ("ils se dirigent vers les remparts familiers, où résidait alors Marie, la porte de Dieu") ; tous les disciples en effet recouraient à la vierge elle-même comme à la très abondante fontaine de sagesse ; ils allaient la voir au sujet de toutes les questions en suspens comme à une arche de divins mystères ; elle était pour eux le moyen d’y accéder et cela était pour eux la sanctuaire des secrets célestes et un oracle.
722 Idem quoque affirmat hieronymus, qui deiperam ait uirginem post filii sui ascensionem cum apostolis semper fuisse uersatam usque ad eorum dispersionem per omnis terras. nec solum eos suo diuino aspectu nympha coelestis exhilarabat: Sed etiam ut idem affirmat hieronymus. doctrina et sapientia instituebat: Inter apostolos inquit post resurrectionem christi intrans et exiens cum eis familiariter de resurrectione christi atque incarnatione contulit: Ecce domino ascendente in coelum: uocat apostolos uirgo in schola uirtutum: conuersatur cum senatoribus coeli: in curia paradisi sub disciplina spiritus sancti totiusque maiestatis diuinae. Jérôme également affirme la même chose en disant que la vierge mère de Dieu après l’ascension de son fils était toujours dans la compagnie des apôtres jusqu’à leur dispersion à travers toutes les terres et que cette nymphe céleste non seulement les réjouissait de son aspect divin, mais encore les enseignait, selon l’affirmation du même Jérôme, de sa science et de sa sagesse : "au milieu des apôtres", écrit-il, "après la résurrection, entrant et sortant, elle conféra avec eux de manière intime au sujet de la résurrection du Christ et de son incarnation" ; et "voici que, le Seigneur montant dans le ciel, la vierge appelle les apôtres à l’école des vertus, elle converse avec les sénateurs du ciel, dans la curie du paradis sous la discipline du saint Esprit et de toute la divine majesté".
722 Idem quoque affirmat hieronymus, qui deiperam ait uirginem post filii sui ascensionem cum apostolis semper fuisse uersatam usque ad eorum dispersionem per omnis terras. nec solum eos suo diuino aspectu nympha coelestis exhilarabat: Sed etiam ut idem affirmat hieronymus. doctrina et sapientia instituebat: Inter apostolos inquit post resurrectionem christi intrans et exiens cum eis familiariter de resurrectione christi atque incarnatione contulit: Ecce domino ascendente in coelum: uocat apostolos uirgo in schola uirtutum: conuersatur cum senatoribus coeli: in curia paradisi sub disciplina spiritus sancti totiusque maiestatis diuinae. Jérôme également affirme la même chose en disant que la vierge mère de Dieu après l’ascension de son fils était toujours dans la compagnie des apôtres jusqu’à leur dispersion à travers toutes les terres et que cette nymphe céleste non seulement les réjouissait de son aspect divin, mais encore les enseignait, selon l’affirmation du même Jérôme, de sa science et de sa sagesse : "au milieu des apôtres", écrit-il, "après la résurrection, entrant et sortant, elle conféra avec eux de manière intime au sujet de la résurrection du Christ et de son incarnation" ; et "voici que, le Seigneur montant dans le ciel, la vierge appelle les apôtres à l’école des vertus, elle converse avec les sénateurs du ciel, dans la curie du paradis sous la discipline du saint Esprit et de toute la divine majesté".
723 Sed hic ambiguitas quaedam animum punget alicuius: qui percunctabitur numquid uirgo interfuerit assumptioni gloriosae filii sui: cum dicat beatus lucas apostolos redisse in hierusalem: et arator quoque eos narret uenisse in eum locum ubi erat mater domini. Mais, à ce point, une ambiguïté pourra piquer certain au vif et lui faire demander s’il est vrai que la vierge était présente à la glorieuse ascension de son fils, alors que le bienheureux Luc dit que les apôtres retournèrent à Jérusalem et qu’Arator aussi raconte qu’ils vinrent dans le lieu où se trouvait la mère du Seigneur.
725 Nam si diuus hieronymus de curiae coelestis regina ac deipera uirgine dubitat an assumpta fuerit cum corpore: an abierit relicto corpore: propterea quod hoc sacra scriptura minime declarat: cum sit uero simillimum maximeque credibile cum corpore eam in regno coelesti degere: si de iis quoque ambigit: quos cum domino teste euangelio resurrexisse credimus: utrum redierint in puluerem: an in illis completa sit resurrectio: quod ueri testes non essent nisi eorum uera fuisset resurrectio et cum corpore pariter ascendissent: quid? audebimus certo diffinire: quod nobis sine periculo licet ignorare? profecto satius est cancellos nostrae intelligentiae sane exinguos intra imbecillitatem suam cohercere: quam de inscrutabilibus atque inaccessis dei actionibus inconsulto ac temeraria assertione iudicare. De fait, si le divin Jérôme a un doute pour savoir si la reine de la curie céleste et la vierge mère de Dieu a été emportée au ciel avec son corps ou si elle est partie en abandonnant son corps pour la raison que l’Ecriture sainte n’en dit absolument rien, alors qu’il est extrêmement vraisemblable et parfaitement crédible qu’elle vit avec son corps dans le royaume céleste, et si quelqu’un a des doutes au sujet de ceux que nous croyons ressuscités avec le Christ au témoignage de l’évangile, pour savoir s’ils sont retournés à la poussière ou si en eux la résurrection a été complète, pourrait-on dire qu’ils ne seraient pas de vrais témoins s’ils n’avaient pas eu une véritable résurrection et s’ils n’étaient pareillement montés au ciel avec leur corps. Quoi ? Oserions-nous apporter une réponse définitive à une question que nous pouvons ignorer sans danger pour nous ? De fait, il est bien mieux de renfermer les bornes de notre intelligence certes réduites dans les limites de sa faiblesse que de juger sans réfléchir et dans une téméraire affirmation sur des sujets insondables et des actions divines qui nous échappent.
726 Verum si licet exemplo sanctissimorum uirorum: piis in nostrae salutis auctricem affectibus: habenas efundere: sicut prona fide in sententiam diui Ambrosii eo: qui dominum ait post resurrectionem primo suae genitrici apparuisse: ita a quodam alio sancto uiro facile persuadeor ipsam ascensionis dominicae gaudiis praecipue interfuisse: atque in die pentecostes cum apostolis spiritus sancti gratiam accepisse: quam a conceptione christi plenissime habuit. Mais s’il nous est permis à l’exemple des saints les plus accomplis de laisser libre cours à nos pieux sentiments envers celle qui fut l’origine de notre salut, je me rangerai en lui faisant toute confiance à l’avis du divin Ambroise qui dit que le Seigneur après sa résurrection est apparu d’abord à sa mère ; ainsi quelque autre saint me convainc aisément que la vierge elle-même a assisté de manière particulière à la joie de l’ascension du Seigneur et que, le jour de pentecôte, elle a reçu avec les apôtres la grâce de l’Esprit saint qu’elle avait possédé en totale plénitude depuis la conception du Christ.
726 Verum si licet exemplo sanctissimorum uirorum: piis in nostrae salutis auctricem affectibus: habenas efundere: sicut prona fide in sententiam diui Ambrosii eo: qui dominum ait post resurrectionem primo suae genitrici apparuisse: ita a quodam alio sancto uiro facile persuadeor ipsam ascensionis dominicae gaudiis praecipue interfuisse: atque in die pentecostes cum apostolis spiritus sancti gratiam accepisse: quam a conceptione christi plenissime habuit. Mais s’il nous est permis à l’exemple des saints les plus accomplis de laisser libre cours à nos pieux sentiments envers celle qui fut l’origine de notre salut, je me rangerai en lui faisant toute confiance à l’avis du divin Ambroise qui dit que le Seigneur après sa résurrection est apparu d’abord à sa mère ; ainsi quelque autre saint me convainc aisément que la vierge elle-même a assisté de manière particulière à la joie de l’ascension du Seigneur et que, le jour de pentecôte, elle a reçu avec les apôtres la grâce de l’Esprit saint qu’elle avait possédé en totale plénitude depuis la conception du Christ.
728 quod siquis quaerat: cur ergo ibi non coierunt. Respondet magister in.ii. ex sententia Augustini: quia creata muliere mox transgressio facta est: et eiecti sunt de paradiso: Vel quia nondum deus iusserat ut coirent. Et poterat diuina expectari authoritas ubi concupiscentia non angebat. Deus uero non iusserat: quia casum eorum praesciebat: de quibus homo propagandus erat: Cum ergo Eua uirgo fuerit cum peccauit: et cum ad peccatum uirum suum impulit: Et uirgo quoque fuerit maria deipera in re et effectu illi aduersa. nam prima uirgo cuncta mala attulit per peccatum: secunda uirgo maria cuncta bona per christum: Et si quelqu’un demande : pourquoi ne s’unirent-ils pas alors ?, La réponse se trouve chez le Maître des Sentences, suivant l’avis d’Augustin : "une fois la femme créée la transgression suivit immédiatement et ils furent chassés du paradis, soit parce que Dieu ne leur avait pas encore donné l’ordre de s’unir. Et ils pouvaient attendre l’autorité divine puisque le désir ne les pressait pas. Dieu à la vérité n’avait pas donné cet ordre car il avait la prescience de leur chute de ceux qui devaient assurer la propagation du genre humain". Vu donc qu’Eve était vierge quand elle commit son péché, elle l’était aussi quand elle poussa son mari au péché. Et Marie, mère de Dieu, était vierge en vérité mais par l’effet contraire à celle-ci. De fait quand la première vierge apporta tous les maux par son péché, une seconde vierge apporta tous les biens par le Christ.
728 quod siquis quaerat: cur ergo ibi non coierunt. Respondet magister in.ii. ex sententia Augustini: quia creata muliere mox transgressio facta est: et eiecti sunt de paradiso: Vel quia nondum deus iusserat ut coirent. Et poterat diuina expectari authoritas ubi concupiscentia non angebat. Deus uero non iusserat: quia casum eorum praesciebat: de quibus homo propagandus erat: Cum ergo Eua uirgo fuerit cum peccauit: et cum ad peccatum uirum suum impulit: Et uirgo quoque fuerit maria deipera in re et effectu illi aduersa. nam prima uirgo cuncta mala attulit per peccatum: secunda uirgo maria cuncta bona per christum: Et si quelqu’un demande : pourquoi ne s’unirent-ils pas alors ?, La réponse se trouve chez le Maître des Sentences, suivant l’avis d’Augustin : "une fois la femme créée la transgression suivit immédiatement et ils furent chassés du paradis, soit parce que Dieu ne leur avait pas encore donné l’ordre de s’unir. Et ils pouvaient attendre l’autorité divine puisque le désir ne les pressait pas. Dieu à la vérité n’avait pas donné cet ordre car il avait la prescience de leur chute de ceux qui devaient assurer la propagation du genre humain". Vu donc qu’Eve était vierge quand elle commit son péché, elle l’était aussi quand elle poussa son mari au péché. Et Marie, mère de Dieu, était vierge en vérité mais par l’effet contraire à celle-ci. De fait quand la première vierge apporta tous les maux par son péché, une seconde vierge apporta tous les biens par le Christ.
729 ideo ait Arator. Virgo secunda scilicet maria: fugat id est repellit et procul abigit scilicet per christum filium suum: mala criminis id est peccati: Euae scilicet primae uirginis. C’est la raison pour laquelle Arator déclare uirgo secunda ("une seconde vierge") évidemment Marie, fugat ("met en fuite") autrement dit repousse et envoie au loin, évidemment par le Christ son fils, mala criminis ("les maux issus du crime") autrement dit le péché, Euae autrement dit la première vierge.
730 Hic super anunciatione Angelica Albertus ille: Eua inquit dannat: maria saluat. unde ipsam nomen Euae mutauit. Illa omnes homines generat in mundum: ista in coelum: illa mater carnalis: ista spiritualis. Illa mater miseriae: ista mater misericordiae. Illa principium mortalitatis: ista principium regenerationis. illa gratiam perdidit: ista gratiam inuenit. Illa transiuit et nos transire fecit de gratia in culpam. ista nos surgere fecit de culpa in gratiam. Illa de latere uiri dormientis facta: ista de corde dei uigilantis. Illa uiro suo occasio fuit perditionis: haec uiro suo adiutorium redemptionis. illa desponsatur origo corruptarum: haec desponsatur mansura uirgo uirginum. Illa prima uirginitatem perdidit: ista prima uirginitatem deo Consecrauit. Illa a diabolo decepta: ista ab angelo edocta. Illam diabolus uicit per superbiam: ista diabolum uicit per humilitatem. Ici Albert dans le Traité sur l’Annonciation de l’ange déclare : "Eve condamne, Marie sauve, d’où cette même Eve a changé son nom. Celle ci engendre tous les hommes dans le monde, celle-là dans le ciel ; celle-ci est mère charnelle, celle-là spirituelle. Celle-ci est la mère des misères, celle-là la mère de miséricorde ; celle-ci est le principe de la mortalité, celle-là le principe de la régénération ; celle-ci perdit la grâce, celle-là trouva la grâce ; celle-ci passa et nous fit passer de la grâce à la faute, celle-là nous fit nous relever de la faute dans la grâce ; celle-là fut créée du côté de l’homme endormi, celle-là du coeur vigilant de Dieu ; celle-ci fut l’occasion de la perdition de son mari, celle-là pour son mari le secours de la rédemption ; celle-ci est fiancée à l’origine de toutes les femmes corrompues, celle-ci est fiancée pour demeurer la vierge des vierges ; celle-ci la première perdit sa virginité, celle-là la première consacra sa virginité à Dieu ; celle-ci fut trompée par le diable, celle-là enseignée par un ange ; le diable vainquit celle-ci par orgueil, celle-là vainquit le diable par humilité".
731 His uerbis alberti uidemus quot mala attulit eua prima uirgo quae omnia sustulit uirgo secunda maria deipera. Par ces mots d’Albert, nous voyons combien de maux Eve la première vierge apporta qui furent enlevés tous par la seconde vierge, Marie, la mère de Dieu.
732 (nulla est.) ideo nulla est iniuria sexus muliebris: quia si per mulierem mors intrauit in mundum: per mulierem uita rediit: Et si mulieribus est dedecori peccatum Euae: eisdem decori est et ornamento per mulierem restitutio scilicet mariam uirginem. (nulla est.) c’est pourquoi nulla est iniuria sexus ("elle ne connaît pas la souillure due à son sexe") féminin, parce que, si, par une femme, la mort entra dans le monde, par une femme, la vie y revint ; et si pour les femmes le péché d’Eve fut une cause de déshonneur, pour ces mêmes femmes ce fut pour leur honneur et leur beauté que cela leur fut rendu par une femme, évidemment la vierge Marie.
733 Hinc in quadam homelia sanctus Maximus: eua posteros ex sua carne nascentes transtulit ad inferos: benedicta uirgo ex sua prole natos dirigit ad coelos. Ex carne Euae nati dicuntur filii hominum: ex carne mariae filii renati dicuntur filii dei. Caedat ergo nunc improperium Euae: quia uniuersi sumus laeti per partum beatae mariae uirginis: et uitam quam destruxerat Eua reparat uirgo maria. De là vient que dans une homélie, saint Maxime déclare : "Eve transporta aux enfers la postérité qui naquit de sa chair, la vierge bénie dirigea par sa progéniture ses enfants vers les cieux ; de la chair d’Eve naquirent, dit-on, les fils des hommes, de la chair de Marie renaquirent, dit-on, les fils de Dieu ; que tombent donc désormais les reproches faits à Eve car tous nous sommes joyeux grâce à l’enfantement de la bienheureuse vierge Marie" et la vie qu’Eve avait détruite, la vierge Marie la restaure.
733 Hinc in quadam homelia sanctus Maximus: eua posteros ex sua carne nascentes transtulit ad inferos: benedicta uirgo ex sua prole natos dirigit ad coelos. Ex carne Euae nati dicuntur filii hominum: ex carne mariae filii renati dicuntur filii dei. Caedat ergo nunc improperium Euae: quia uniuersi sumus laeti per partum beatae mariae uirginis: et uitam quam destruxerat Eua reparat uirgo maria. De là vient que dans une homélie, saint Maxime déclare : "Eve transporta aux enfers la postérité qui naquit de sa chair, la vierge bénie dirigea par sa progéniture ses enfants vers les cieux ; de la chair d’Eve naquirent, dit-on, les fils des hommes, de la chair de Marie renaquirent, dit-on, les fils de Dieu ; que tombent donc désormais les reproches faits à Eve car tous nous sommes joyeux grâce à l’enfantement de la bienheureuse vierge Marie" et la vie qu’Eve avait détruite, la vierge Marie la restaure.
733 Hinc in quadam homelia sanctus Maximus: eua posteros ex sua carne nascentes transtulit ad inferos: benedicta uirgo ex sua prole natos dirigit ad coelos. Ex carne Euae nati dicuntur filii hominum: ex carne mariae filii renati dicuntur filii dei. Caedat ergo nunc improperium Euae: quia uniuersi sumus laeti per partum beatae mariae uirginis: et uitam quam destruxerat Eua reparat uirgo maria. De là vient que dans une homélie, saint Maxime déclare : "Eve transporta aux enfers la postérité qui naquit de sa chair, la vierge bénie dirigea par sa progéniture ses enfants vers les cieux ; de la chair d’Eve naquirent, dit-on, les fils des hommes, de la chair de Marie renaquirent, dit-on, les fils de Dieu ; que tombent donc désormais les reproches faits à Eve car tous nous sommes joyeux grâce à l’enfantement de la bienheureuse vierge Marie" et la vie qu’Eve avait détruite, la vierge Marie la restaure.
733 Hinc in quadam homelia sanctus Maximus: eua posteros ex sua carne nascentes transtulit ad inferos: benedicta uirgo ex sua prole natos dirigit ad coelos. Ex carne Euae nati dicuntur filii hominum: ex carne mariae filii renati dicuntur filii dei. Caedat ergo nunc improperium Euae: quia uniuersi sumus laeti per partum beatae mariae uirginis: et uitam quam destruxerat Eua reparat uirgo maria. De là vient que dans une homélie, saint Maxime déclare : "Eve transporta aux enfers la postérité qui naquit de sa chair, la vierge bénie dirigea par sa progéniture ses enfants vers les cieux ; de la chair d’Eve naquirent, dit-on, les fils des hommes, de la chair de Marie renaquirent, dit-on, les fils de Dieu ; que tombent donc désormais les reproches faits à Eve car tous nous sommes joyeux grâce à l’enfantement de la bienheureuse vierge Marie" et la vie qu’Eve avait détruite, la vierge Marie la restaure.
734 ideo subdit (Restituit) scilicet beata uirgo illud scilicet bonum quod prima tulit id est prima uirgo eua abstulit peccando. C’est la raison pour laquelle il ajoute (restituit), évidemment la bienheureuse vierge, évidemment le bien quod prima tulit ("ce que la première a emporté") autrement dit que la première vierge Eve emporta en péchant.
735 Nam per christum filium mariae a poena temporaria et aeterna liberamur ut ait magister in.iii. dist. xix: Ab aeterna quidem relaxando debitum: a temporali uero penitus nos liberabit in futuro: quando nouissima mors inimica destruetur. Adhuc enim expectamus redemptionem corporis. secundum animas uero iam redempti sumus ex parte non ex toto a culpa non a poena. Nec omnino a culpa. non enim sic redempti sumus ut non sit sed ut non dominetur. De fait, par le Christ, fils de Marie, nous sommes libérés d’un châtiment à la fois temporel et éternel, comme le dit le Maître des Sentences, 3 dist. 19 : "Du châtiment éternel il nous libéra par la remise de notre dette, du châtiment temporel il nous libèrera totalement dans le futur quand son dernier ennemi, la mort, sera détruit ; nous attendons encore en effet la rédemption du corps, car selon l’âme nous sommes rachetés en partie et non en totalité, de la faute non du châtiment, et pas totalement de la faute, car nous sommes rachetés non de telle manière qu’elle n’existe plus mais de telle manière qu’elle ne domine plus sur nous".
797 (persona) id est eua tantum: non uniuersa natura muliebris: dedit ruinam idest casum hoc est fecit cadere Adam: quo cadente nos omnes eius posteri cecidimus: non natura scilicet foeminea tota. sicut non tota natura Muliebris dedit nobis Salutiferum lesum: sed sola uirgo Maria sexus gloria foeminei. cum autem dixit Arator persona ruinam dedit: sic intellige ut cum dicitur peccatum per unum hominem intrasse in mundum idest in naturam humanam. quia mulier ante uirum peccauit: et mulier de uiro facta est. (persona) autrement dit Eve seulement, et non la nature féminine dans son ensemble, dedit ruinam ("a provoqué la ruine"), autrement dit le malheur de faire chuter Adam ; par sa chute, nous tous, ses descendants, avons chuté ; non natura ("non sa nature"), évidemment la nature féminine entière, de même que ce n’est pas toute la nature féminine qui nous donna Jésus le Sauveur, mais la seule vierge Marie, gloire du sexe féminin. Or quand Arator dit persona ruinam dedit ("la personne a provoqué la ruine"), comprenez comme quand on dit que par un seul homme le péché est entré dans le monde, autrement dit dans la nature humaine, parce que la femme a péché avant l’homme et la femme a été créée de l’homme.
800 (Tunc foemina) comparatio est primae uirginis Euae ad secundam uirginem mariam: Virgo erat Eua: et tamen grauida facta est concipiendo sine uiro non infantem: sed fastum superbiae uolens usurpare diuinitatis aequalitatem: et nimia insolentia elata credidit ita futurum. (Tunc foemina) c’est une comparaison entre Eve, la première vierge, et la seconde vierge, Marie : Eve était vierge et cependant elle fut grosse en concevant sans homme, non pas un enfant mais la morgue de son orgueil, en voulant usurper l’égalité avec la divinité ; enflée d’une excessive insolence elle crut qu’il en serait ainsi.
803 At uirgo Maria contra: humilitatis unicum specimen: quae mater dei se ancillam uocat: tumuit non spiritu superbiae ut Eua: sed infantis Christi corpusculo intus per spiritum sanctum formato. Mais tout au contraire, la vierge Marie, unique modèle d’humilité, qui, alors qu’elle est mère de Dieu, se nomme servante, ne s’enfla pas comme Eve de l’esprit d’orgueil, mais du minuscule corps du Christ enfant formé en elle par le saint Esprit.
806 Nunc id est in aduentu domini cum per spiritum sanctum christi corpus in utero uirginis formatum est: tumuit scilicet uirgo maria non metaphorice sed reuera utero tumescente: paritura deum scilicet christum qui deus et homo est. mortalia gignens scilicet beata uirgo id est corpus illud christi mortale et patibile et ferens diuina idest deum. Nunc ("maintenant"), autrement dit dans la venue du Seigneur par l’action du saint Esprit, le corps du Christ a été formé dans le sein de la vierge, tumuit ("elle fut grosse"), évidemment la vierge Marie, et non pas de manière métaphorique mais dans son ventre qui en réalité grossit ; paritura deum ("du Dieu qu’elle va engendrer"), évidemment le Christ qui est Dieu et homme ; mortalia gignens ("donnant naissance à une vie mortelle"), évidemment la vierge bienheureuse, autrement dit le corps mortel et passible du Christ, et ferens divina ("portant une vie divine"), autrement dit Dieu.
806 Nunc id est in aduentu domini cum per spiritum sanctum christi corpus in utero uirginis formatum est: tumuit scilicet uirgo maria non metaphorice sed reuera utero tumescente: paritura deum scilicet christum qui deus et homo est. mortalia gignens scilicet beata uirgo id est corpus illud christi mortale et patibile et ferens diuina idest deum. Nunc ("maintenant"), autrement dit dans la venue du Seigneur par l’action du saint Esprit, le corps du Christ a été formé dans le sein de la vierge, tumuit ("elle fut grosse"), évidemment la vierge Marie, et non pas de manière métaphorique mais dans son ventre qui en réalité grossit ; paritura deum ("du Dieu qu’elle va engendrer"), évidemment le Christ qui est Dieu et homme ; mortalia gignens ("donnant naissance à une vie mortelle"), évidemment la vierge bienheureuse, autrement dit le corps mortel et passible du Christ, et ferens divina ("portant une vie divine"), autrement dit Dieu.
807 Nam simul ac beata uirgo dixit: ecce ancilla: et assensum coelesti legationi praestitit: quattuor miracula in utero uirginis diuinitas operata est. De fait, dès que la bienheureuse vierge dit "voici la servante" et offrit son accord au céleste envoyé, la divinité opéra dans le sein de la vierge quatre miracles.
808 Vnum fuit corporis christi de puris sanguinibus uirginis generatio idest conceptio et formatio. Non enim per successionem formatum est sanctum corpus ut caetera corpora: sed repente totum. Le premier fut la génération du corps du Christ du sang pur de la vierge, autrement dit sa conception et sa formation ; en effet le corps saint n’a pas été formé dans une succession d’étapes comme tous les autres corps, mais tout entier en un seul moment.
813 Nunquam enim: hoc est nec in tempore nec in momento humanitas illa actu extitit in se ipsa: alioquin quis uere diceret filium dei conceptum in uirgine? Jamais en effet, ce qui veut dire ni dans le temps ni dans un moment, cette humanité n’a existé en acte en elle-même ; s’il en était autrement, qui dirait en vérité que le Fils de Dieu a été conçu dans la vierge ?
814 merito igitur dicit gignens scilicet in momento mortalia id est corpus mortale: et anima uiuificatum: et eodem momento ferens diuina idest filium dei deum: ut sit theotocos idest deipera uirgo. C’est donc à bon droit qu’il dit gignens ("donnant naissance") évidemment en un moment, mortalia ("à une vie mortelle"), autrement dit un corps mortel et vivifié par une âme, et dans le même moment ferens diuina ("portant une vie divine") autrement dit le Fils de Dieu qui est Dieu, de telle sorte qu’elle est θεοτόκος, autrement dit vierge mère de Dieu.
817 Nam quemadmodum non est mortua mors nisi in uita: utque adam peccauit in dulcedine ligni uetiti: christus satisfecit in amaritudine crucis et fellis: sic ualde congruum fuit ut superbia Euae: contraria deiperae uirginis humilitate sanaretur. De fait, de même que la mort n’est morte que dans la vie, et de même qu’Adam a péché dans la douceur de l’arbre interdit, alors que le Christ a apporté la réparation dans l’amertume de la croix et du fiel, ainsi il était parfaitement cohérent que l’orgueil d’Eve soit guéri par l’humilité de la vierge mère de Dieu.
818 Et sicut altera fuit aduersa alteri: ita alterius effectus effectibus alterius repugnant. Eua occidendo obfuit: maria uiuificando profuit. ab Eua ortum malum est cuius obprobrium in omnes transit mulieres: a uirgine deipera bonum nascitur: cuius decus mulierum dedecus tollit. Et de même que l’une s’opposa à l’autre, de même les effets produits par l’une combattent les effets produits par l’autre : Eve fut un obstacle en apportant la mort, Marie un secours en apportant la vie, d’Eve naquit le mal dont la honte passe dans toutes les femmes, de la vierge mère de Dieu naît le bien dont l’honneur ôte le déshonneur des femmes.
818 Et sicut altera fuit aduersa alteri: ita alterius effectus effectibus alterius repugnant. Eua occidendo obfuit: maria uiuificando profuit. ab Eua ortum malum est cuius obprobrium in omnes transit mulieres: a uirgine deipera bonum nascitur: cuius decus mulierum dedecus tollit. Et de même que l’une s’opposa à l’autre, de même les effets produits par l’une combattent les effets produits par l’autre : Eve fut un obstacle en apportant la mort, Marie un secours en apportant la vie, d’Eve naquit le mal dont la honte passe dans toutes les femmes, de la vierge mère de Dieu naît le bien dont l’honneur ôte le déshonneur des femmes.
819 Nam si uir decidit per foeminam: iam non erigitur nisi per feminam. ideo subiicit: (per quam scilicet uirginem) mariam: mediator scilicet Christus: prodiit idest exiuit: in orbem idest in mundum: et portauit scilicet Christus: ueram carnem id est uerum corpus: non phantasticum aut fictum sed illud idem numero quod fuit in sepulchro: ad aethera idest coelum. De fait, si l’homme tomba à cause de la femme, désormais il n’est relevé que par la femme ; c’est pourquoi il ajoute per quam ("par cette femme") évidemment la vierge Marie, mediator ("le médiateur"), évidemment le Christ, prodiit ("s’est avancé"), autrement dit est sorti, in orbem ("dans le monde"), et portauit ("et a emporté"), évidemment le Christ, ueram carnem ("une chair bien réelle"), autrement dit un vrai corps et non un corps de fantôme ou feint, mais le même selon le nombre qui fut dans le sépulcre, ad aethera ("vers l’éther") autrement dit le ciel.
822 Vt enim beatus andreas Egeae proconsuli retulit: consentaneum erat ut primus Adam ex terra uirgine idest intacta et inexercita prodiit: ita Adam secundus hoc est Christus: ex uirgine illibata et ab omnis uiri complexibus abhorrente prodiret: utque illa unde protoplastus formatur paradisi fluminibus rigabatur: ita haec solum coelesti gratia tanquam paradisi amnibus rigata est. En effet, comme le dit le bienheureux André au proconsul Egéas : il était cohérent que le premier Adam s’avançât de la terre vierge, autrement dit intacte et non travaillée, et qu’ainsi le second Adam, à savoir le Christ, s’avançât d’une vierge immaculée et qui s’était tenue éloignée de toute étreinte d’homme, et que, de même que celle dont était formé le premier homme était baignée des fleuves du paradis, de même celle-ci seule fut baignée de la grâce céleste comme des fleuves du paradis.
823 Eua peccatum inchoauit: uir absoluit. deipera reparationem incepit: Christus absoluit ac perfecit. ideo ait per quam prodiit in mundum quasi per portam Christus: qui redemptor et liberator humani generis extitit. Eve commença à pécher et Adam mit le point final ; la mère de Dieu commença la réparation, le Christ l’accomplit et la mena à sa perfection ; voilà pourquoi il dit per quam prodiit ("par cette femme s’est avancé") le Christ dans le monde comme passant par une porte, lui qui fut le rédempteur et libérateur du genre humain.
834 (PRIMVS) in hac tertia primi libri sectione: posteaquam narrauit poeta: quo pacto apostoli in hierusalem redierunt: ubi uirgo deipera cum mulieribus et fratribus erat: consequentem historiae apostolicae expositionem copulat et connectit. (PRIMVS) Dans cette troisième section du premier livre, après avoir raconté de quelle manière les Apôtres sont revenus à Jérusalem, où se trouvait la Vierge Mère de Dieu avec les femmes et les frères, le poète relie et rattache à cela la suite de son exposé de l’histoire apostolique.
1059 Quamuis autem fratres natura dicantur ut petrus frater andreae: et loannes iacobi: et iudas alterius iacobi: aut aliter fratres appellentur qui sunt eiusdem gentis ut israelitae: aut cognatione ut qui fratres domini uel mariae deiperae uocabantur: aut affectu quoque carnali ut ex uno adam protoplasto cuncti nati: tamen maxime fratres sunt quos baptismatis palingenesia hoc est regeneratio facit germanos unius parentis uere ac propriissime germina. Bien qu’on puisse parler de frères selon la nature, comme Pierre est le frère d’André et Jean, celui de Jacques, et Jude, celui de l’autre Jacques, ou bien encore que l’on nomme frères des gens qui appartiennent à la même race, comme les Israélites, ou par la parenté comme on désignait les frères du Seigneur ou de Marie la mère de Dieu, ou par l’affection charnelle comme du seul Adam notre premier parent tous les hommes sont nés, cependant ils sont tout particulièrement frères ceux que la παλιγγενεσία, autrement dit la régénération baptismale, rend frères issus d’un unique père, et ses rejetons au sens le plus strict.
1121 (Permittens) scilicet se pati iura scilicet leges: carnis scilicet humanae: quae est subiecta uariis calamitatibus et diformibus miseriis: et quia hoc passus est christus non secundum quod deus est: sed secundum quod homo: ideo subdit: fusus scilicet christus et emissus in hanc uitam mortalem ab aluo id est uentre: genitricis id est matris mariae. (Permittens), évidemment se pati iura ("d’endurer les droits"), évidemment les lois, carnis ("de la chair"), évidemment humaine qui est soumise à des calamités variées et des misères qui la défigurent ; et parce que le Christ a souffert cela, non selon sa nature divine, mais selon sa nature humaine, il ajoute fusus ("éclos"), évidemment le Christ, et envoyé dans cette vie mortelle ab aluo ("du sein"), autrement dit du ventre, genitricis ("de sa mère"), autrement dit Marie sa mère.
1124 (Sed) quod. id iam exposuimus: quod modo dicit poeta. Illud obit scilicet illa humanitas christi in cruce mortua est: quae nascitur de uirgine scilicet maria: foeta id est grauida et plena. (Sed) quod. Nous avons déjà expliqué ce que dit le poète. Illud obit ("c’est cela qui est mort"), évidemment l’humanité du Christ qui est morte en croix, qui nascitur de uirgine ("qui est née de la Vierge"), évidemment Marie, foeta ("enfantant"), autrement dit enceinte et grosse.
1164 (Deus omnipotens) id est sanctissima trinitas: quae in omnibus effectibus principaliter opatur: secundum regulam illam theologicam: omnia praedicamenta dicta de deo transeunt in substantiam: excepta relatione: quae ratione subiecti in quo est: transit in substantiam ne faciat compositionem: ratione uero termini ad quem est: manet: ut faciat distictionem. Quamuis autem dicat augus. intelligamus deum quantum possumus sine quantitate magnum:sine qualitate bonum: et caetera: atque ita illas uoces communissimas deo procul abigat tamen quia alias non habemus: quibus dei explicemus inefabilia opera: nisi sit relatio: uel aliquod consequens personam peculiariter (sicut mittere et non mitti patri competit: et e diuerso mitti et non mittere spiritui sancto: At filio utrumque congruit scilicet mitti et mittere: congruit et incarnari soli filio:) nisi ergo sint uel relationis nomina: uel horum peculiares quaedam appendices: licet attribuantur singulae cuique personae multa: in communionem tamen ueniunt trium personarum. Vt cum dicimus christum conceptum et natum de spiritu sancto: non dicimus spiritum sanctum christi patrem: nam et capillus ex nobis dicitur nasci: qui non uocatur noster filius: et qui ex aqua et spiritu nascuntur: non sunt filii aquae (ut ait magister in iii.) quamuis ergo spiritus sancti dicatur opus: christi incarnatio: sicut in euangelio dicitur de maria: inuenta est in utero habens de spiritu sancto: tamen illam creaturam: quam uirgo concepit et peperit: tota unitas fecit et operata est. Nec enim inseperabilia sunt opera trinitatis: quin imo nominato uno tres intelliguntur iuxta eam regulam quam proposuimus: atque ita quoque resurrectionem christi beatissima trinitas peregit: et assumptionem admirabilem: et reliqua opera coelestia. (Deus omnipotens), autrement dit la très sainte Trinité, qui agit de manière principale dans tout ce qui est effectué, conformément à cette règle théologique : tous les prédicats que l’on attribue à Dieu se changent en sa substance, à l’exception de la relation, qui, à raison du sujet dans lequel elle se trouve, se change en substance, afin de ne pas opérer de composition, mais, à raison du terme vers lequel elle tend, demeure à sa place pour opérer une distinction. Bien que, cependant, Augustin dise "nous comprenons Dieu à la mesure de notre capacité comme grand sans quantité et bon sans qualité etc.", et bien qu’il repousse ces paroles loin de Dieu comme absolument triviales, cependant, parce que nous n’en avons pas d’autres pour expliquer les œuvres ineffables de Dieu, sinon de dire que c’est une relation, autrement dit quelque chose qui concerne une personne en particulier (comme envoyer sans être envoyé convient au Père, au contraire être envoyé sans envoyer convient au saint Esprit, mais les deux s’adaptent au Fils, à la fois être envoyé et envoyer, mais s’incarner s’adapte au seul Fils) ; si donc il n’existe pas de noms pour la relation, autrement dit d’ajouts particuliers apportés aux personnes de la Trinité, on peut bien attribuer beaucoup à chaque personne, ces attributs finissent cependant par être communs aux trois personnes. Ainsi, quand nous disons que le Christ a été conçu et est né du saint Esprit, nous ne disons pas que le saint Esprit est le père du Christ (de fait on dit que les cheveux naissent de nous, mais on ne les appelle pas pour autant fils) ; et ceux qui naissent de l’eau et de l’esprit ne sont pas les fils de l’eau (comme le dit le Maître au livre 3) ; donc, même si la naissance du Christ est dite œuvre du saint Esprit, comme on le dit dans l’évangile à propos de Marie, "elle se trouva enceinte sous l’action du saint Esprit", cependant la créature que la vierge a conçue et engendrée, c’est l’unité tout entière de la Trinité qui l’a faite et réalisée. En effet, les œuvres de la Trinité ne sont pas inséparables : tout au contraire, en nommant un on comprend trois, selon la règle que nous avons proposée, et on comprend aussi le fait qu’ainsi également c’est la très bienheureuse Trinité qui a accompli la résurrection du Christ et son admirable ascension et le reste des œuvres célestes.