ad initium

Augustinus

186 Nam ut inquit diuus Augustinus animalis cuiusque creatio: habeat pium prudentemque consideratorem: inefabilem laudem creatori excitat. De fait, comme dit le divin Augustin : "que la création de n’importe quel être vivant trouve un admirateur pieux et prudent et qu’elle éveille en lui une louange ineffable pour son Créateur".

187 Multoque magis uniuersus orbis constans tanta partium uel similitudine uel diuersitate: Tanta rerum uarietate in magnis in paruis: ubi et si maior diuersitas oriatur: est mirabilis ordo proportio et consensus rerum: ubi (ut uerbi utar Aquilae hipponensis) scit ille quid egerit cuius opera iuste nemo comprehendit. Et, bien plus, toute la terre qui consiste en une si grande ressemblance et diversité de ses parties, en une si grande variété dans des êtres grands et petits où, si naît une diversité plus grande, règnent un ordre, une proportion et une harmonie admirables, où, pour reprendre les mots de l’Aigle d’Hippone, "il sait ce qu’il a fait Celui dont personne ne comprend avec justesse l’ouvrage".

282 Quo in loco Aquila hipponensis Mane inquit adueniens stetit iam post resurrectionem in solido. Sur ce passage l’Aigle d’Hippone commente : "venant au matin, il se tint désormais sur la terre ferme après sa résurrection".

311 nam sub litterali: ex quo solo ut Augus. contra uicentium donatistam scribit potest trahi argumentum: continent illi quattuor sensus a theologis notati: historicus: etymologicus: analogicus: parabolicus: sub mystico uero uel spiritali illi tres allegoricus anagogicus: tropologicus: quamquam plerique ueterum theologorum tres tantum nominent scilicet historicum allegoricum et tropologicum sub sensu allegorico anagogicum comprehendentes: Vt hugo in tertio sententiarum. De fait, sous le sens littéral, dont Augustin écrit, dans le traité Contre Vincentius le donatiste, qu’il est le seul dont on puisse tirer argument, sont contenus les quatre sens suivants indiqués par les théologiens : historique, étymologique, analogique et parabolique ; sous le sens spirituel les trois suivants : allégorique, anagogique, tropologique, bien que la plupart des anciens théologiens ne nomment que trois sens à savoir le sens historique, le sens allégorique et le sens tropologique, en incluant sous le sens allégorique le sens anagogique ; ainsi fait Hugues dans le livre 3 des Sentences.

409 (Dies ingressa) dupliciter intelligi potest: dies id est ut corporalis qualis est in die uel etiam multo maior: ingressa ad manes cum christo descendente aut quia moriente domino in cruce petræ scissæ sunt: et terra mota est: et lux solis quae supra terram obtenebrescebat sub terram dominum suum sequebatur ut ait Arator: fugitiua reliquunt astra polum comitata deum: aut quia (ut uerbis utar augustini) sicut adueniente luce solis omnis tenebra in aere existens efugatur: sic adueniente anima christi in limbum infernus illustratur. (Dies ingressa) peut se comprendre de deux manières : le jour autrement dit corporel, tel qu’il est dans la journée voire même bien plus grand, ingressa ad manes ("entra chez les Mânes") avec le Christ qui y descendait ou parce que, quand le Seigneur mourut en croix, les pierres se fendirent et la terre fut ébranlée et la lumière du soleil qui s’était obscurcie sur la terre suivait le Seigneur sous la terre comme le dit Arator : fugitiua reliquunt astra polum comitata deum ("dans leur fuite, les astres abandonnent le ciel et accompagnent Dieu"), ou parce que (pour reprendre les mots d’Augustin) "de même que, à la venue du soleil, toute ténèbre présente dans l’air est mise en fuite, de même, à la venue de l’âme du Christ dans les limbes, l’enfer est éclairé".

414 Item augustinus aperte declarat quam lucem ad manes id est animas exutas patrum sanctorum Christus attulerit: hanc ergo inquit tristiciam et poenam totam Christus conuertit in læticiam et gaudium: dum sanctis patribus animam suam et diuinitatis essentiam ostendit: in qua omnis gloria paradisi consistit. De même Augustin déclare ouvertement quelle lumière le Christ a apporté aux Mânes, autrement dit aux âmes qui ont quitté le corps des saints patriarches ; il déclare : "cette tristesse et ce châtiment total, le Christ les change en joie et en allégresse en montrant aux saints patriarches son âme et l’essence de sa divinité dans laquelle consiste toute la gloire du paradis".

437hoc dictum intellige ut augustinus contra felicianum: Absit ut christus sic senserit mortem ut quantum in se est: uita uitam perdiderit si enim hoc ita esset: uitæ fons aruisset. sensit ergo mortem participatione humani affectus quem sponte susceperat: non naturæ suæ perdidit potentiam: per quam cuncta uiuificat. et ita intelligendum est quod sequitur Comprendre que cela est dit comme Augustin dans le Contre Félicien : "loin de nous la pensée que le Christ ait éprouvé la mort en tant que ce qu’il est en lui-même : la vie perdrait la vie si en effet il en était ainsi ; la source de vie se serait asséchée. Donc il a éprouvé la mort par la participation à la sensibilité humaine qu’il avait volontairement prise sur lui, mais il n’a pas perdu le pouvoir de sa nature, grâce auquel il donne la vie à tout" ; Et c’est ainsi qu’il faut comprendre ce qui suit.

441 quomodo (ut aquila Libyca pulchre ait) potes dicere te non passum iniuriam: si uestis tua conscindatur: quamuis uestis tua non sis tu? multo magis debet dici pati deus: quicquid patitur caro unita uerbo. Comment (comme le dit de belle manière l’aigle libyen) pourrais-tu dire que tu n’as pas souffert de blessure si c’est ton vêtement qui est déchiré (pourtant tu n’es pas ton vêtement) ? D’autant plus alors on doit dire que Dieu a souffert tout ce que souffre la chair unie au Verbe.

445 potest et aliter intelligi ut ad utriusque mortis liberationem benignitas domini extendatur: nam cum sit duplex mors: una quam timent homines: quæ auctore augustino est separatio animæ a carne: Altera quam non timent: quæ est separatio animæ a deo: ab utraque morte Christus moriens in cruce homines liberauit: Et tunc suam essentiam sanctis patribus ostendit: et corpora multorum suscitauit in testimonium utriusque liberationis electis uenturæ. On peut aussi comprendre autrement et étendre la bonté du Seigneur à la libération de l’une et l’autre mort ; de fait, vu que la mort est double, l’une que craignent les gens et qui, selon Augustin, est la séparation de l’âme et de la chair, l’autre qu’ils ne craignent pas et qui est la séparation de l’âme et de Dieu, de l’une et l’autre mort, le Christ a libéré les hommes en mourant et alors il a montré son essence aux saints patriarches et a ressuscité les corps de beaucoup en témoignage d’une libération à venir de l’une et de l’autre pour les élus.

465 hunc locum declarans augustinus: sicut inquit ex corruptione adæ ad mortem: ita ex spiritu christi ad uitam. omnes in adam moriuntur: omnes in christo uiuificantur. quia nemo ad mortem nisi per illum: nemo ad uitam nisi per istum. quia sicut per adam omnes mortales et poena facti sunt filii sæculi: ita et per christum omnes inmortales in gratia fiunt filii dei. Expliquant ce passage Augustin écrit : "de même que de la corruption d’Adam on va vers la mort, de même par l’esprit du Christ on va vers la vie. Tous meurent en Adam, tous dans le Christ accèderont à la vie. Parce que personne ne va à la mort si ce n’est par Adam, personne ne va à la vie si ce n’est par le Christ. Parce que de même que par Adam tous les fils de ce siècle sont devenus mortels et ont connu le châtiment, de même par le Christ tous les fils de Dieu deviennent immortels dans la grâce".

493 fuerunt autem tres dies (ut augustinus in. ii de trinitate author est) synecdochios ut illud puppesque tuæ pubesque tuorum: ubi pars pro toto accipitur. dies una hoc est ueneris: accipitur secundum postremam sui partem: altera secundum se totam id est sabbati: tertia uero secundum partem sui primam hoc est dominica. Or ces trois jours (ainsi que le dit Augustin au livre 2 du De trinitate) furent comptés en faisant une synecdoque comme dans puppesque tuæ pubesque tuorum ("tes poupes et la jeunesse des tiens") où la partie est prise pour le tout. Le premier jour est le vendredi qui est pris en compte pour sa dernière partie, le deuxième jour est totalement pris en compte c’est le samedi, et le troisième est pris en compte pour sa première partie et c’est le dimanche.

508 (Vt ab exule limo) sensus est et ordo omnipotens scilicet christus ipse parat uias scilicet quibus eamus in paradisum patriam nostram: ut origo patriæ: scilicet nostræ diu interclusa id est impedita: repetatur ab exule limo id est ab homine qui factus est de limo terræ synecdochicos a parte totum: exule id est exulante a paradiso patria sua: ad quam deus illum creauit: secundum illud Augustini in confessionibus: fecisti (inquit) nos domine ad te: et ideo inquietum et cor nostrum donec requiescat in te. (Vt ab exule limo) le sens et l’ordre sont : omnipotens ("le Tout-Puissant") évidemment le Christ ipse parat uias ("lui-même prépare les chemins") évidemment par lesquels nous pouvons aller au paradis, notre patrie en sorte que origo patriae ("la patrie d’origine") évidemment la nôtre, longtemps interclusa ("séparée") autrement dit empêchée repetatur ab exule limo ("soit rejointe loin de l’exil de la terre") autrement dit de l’homme qui est fait du limon de la terre, en faisant une synecdoque, le tout pour la partie ; exule ("exil") autrement dit en exil loin du paradis, sa patrie, pour laquelle Dieu l’a créé, selon ce mot d’Augustin dans les Confessions : "tu nous as faits pour toi Seigneur et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi".

544 quos intellectus nostri quasi generosos spiritus in libro de spiritu et anima diuus augustinus celebrat: Anima inquit nostra est tam nobilis ut nisi per summum bonum non possit satiari. C’est cette intelligence en nous comme un esprit généreux que le divin Augustin dans le de Spiritu et Anima célèbre : notre âme est si noble qu’elle ne peut être rassasiée que par le souverain bien.

563 Siquidem hieronymus super matth. dicit hoc dictum psalmi in omnem terram exiuit sonus eorum: et illud christi prædicabitur Euangelium hoc in uniuerso mundo: esse completum per apostolos. At augustinus in epistola ad Exitium: cui consentit origenes super matth. sentit hoc nondum fuisse completum. Ainsi Jérôme dans son commentaire sur Matthieu dit que la parole du psaume "sur toute la terre s’en va le son de leur voix" et cette parole du Christ "cet évangile sera annoncé dans le monde entier" indique que le processus est intégralement accompli par l’intermédiaire des apôtres. Mais Augustin dans la lettre à Exitius, en accord avec Origène dans son commentaire sur Matthieu pense que cela n’a pas été encore intégralement accompli.

565 Litem autem illam hieronymi et Augustini non dirimimus: quia utrunque credo probabile: nec illos dissentire arbitror in nucleo: licet uerba in cortice pugnare uideantur. Le différent entre Jérôme et Augustin, ce n’est pas nous qui allons le trancher, parce je pense que les deux opinions se défendent, et je crois que sur le fond ils ne sont pas en désaccord, même si en surface leurs paroles semblent se contredire.

652 omnia (inquit Damascenus apud magistrum in. iii.) quae in natura nostra plantauit deus uerbum assumpsit: scilicet corpus et animam intellectualem et horum idiomata Descendit ergo deus in terras recte dicitur: dummodo intelligas illud augustini ad uolusianum: deus nouit uenire non recedendo ubi erat: nouit abire non deserendo quo uenerat: nouit ubique totus esse et nullo contineri loco: Tout (comme le dit Jean Damascène cité par le Maître des Sentences en 3) "ce que Dieu a planté dans notre nature, le Verbe l’a assumé, à savoir le corps et l’âme intellectuelle et leur propriétés". "Dieu descendit sur terre" est donc dit de façon juste, du moment que l’on comprend ce passage d’Augustin à Volusianus : "Dieu sait venir sans partir de la où il était ; il sait partir en n’abandonnant pas l’endroit d’où il venait" ; il sait être totalement partout sans que nul lieu jamais ne le contienne.

680 Nam ut inquit Augustinus homo de uirgine procreatus: et a mortuis in æternam uitam resuscitatus: et super coelos exaltatus potentius fortasse opus est quam mundum facere. De fait, comme le dit Augustin : "l’homme a été engendré de la vierge et resssucité des morts pour une vie éternelle et exalté au-dessus des cieux : voilà un acte peut-être plus puissant encore que de faire le monde".

728 quod siquis quaerat: cur ergo ibi non coierunt. Respondet magister in.ii. ex sententia Augustini: quia creata muliere mox transgressio facta est: et eiecti sunt de paradiso: Vel quia nondum deus iusserat ut coirent. Et poterat diuina expectari authoritas ubi concupiscentia non angebat. Deus uero non iusserat: quia casum eorum praesciebat: de quibus homo propagandus erat: Cum ergo Eua uirgo fuerit cum peccauit: et cum ad peccatum uirum suum impulit: Et uirgo quoque fuerit maria deipera in re et effectu illi aduersa. nam prima uirgo cuncta mala attulit per peccatum: secunda uirgo maria cuncta bona per christum: Et si quelqu’un demande : pourquoi ne s’unirent-ils pas alors ?, La réponse se trouve chez le Maître des Sentences, suivant l’avis d’Augustin : "une fois la femme créée la transgression suivit immédiatement et ils furent chassés du paradis, soit parce que Dieu ne leur avait pas encore donné l’ordre de s’unir. Et ils pouvaient attendre l’autorité divine puisque le désir ne les pressait pas. Dieu à la vérité n’avait pas donné cet ordre car il avait la prescience de leur chute de ceux qui devaient assurer la propagation du genre humain". Vu donc qu’Eve était vierge quand elle commit son péché, elle l’était aussi quand elle poussa son mari au péché. Et Marie, mère de Dieu, était vierge en vérité mais par l’effet contraire à celle-ci. De fait quand la première vierge apporta tous les maux par son péché, une seconde vierge apporta tous les biens par le Christ.

742 at mulier quo grauius peccauit eo rigidius seueriusque punita est: plus enim (ut magister in.ii. dist. xxii.) mulier deIiquisse uidetur: quae uoluit usurpare diuinitatis aequalitatem: et nimia presumptione elata credidit ita futurum. adam uero nec illud credidit: et de potentia et de misericordia dei cogitauit: dum uxori morem gerens eius persuasioni consensit nolens eam contristari et a se alienatam relinquere: quam credebat sine suo solatio contabescere et interire: non quidem carnali uictus concupiscentia ut Augustinus ait: quam nondum senserat: sed amicabili quadam beniuolentia: qua plaerumque fit ut offendatur deus ne offendatur amicus. quod eum facere non debuisse diuinae sententiae iustus exitus indicauit. Quant à la femme elle fut punie avec d’autant plus de rigueur et de sévérité qu’elle avait péché plus gravement : "en effet", comme le dit le Maître des sentences 2, dist. 22, "la femme semble avoir péché en voulant usuper l’égalité de la divinité et, gonflée d’une excessive présomption, elle crut qu’il en serait ainsi. Quant à Adam, il ne crut pas même-cela et songea à la puissance et à la miséricorde de Dieu, tandis que, se comportant comme de coutume à l’égard de son épouse, il consentit à ce qu’elle lui suggérait, en ne voulant pas lui faire de peine et la laisser en colère contre lui" ; il craignait que sans la consolation de sa présence elle ne se flétrisse et meure ; "ce n’était certes pas qu’il fût vaincu par la concupiscence charnelle", comme le dit Augustin, "sentiment qu’il n’avait jamais ressenti, mais poussé par une bienveillance amicale, ce qui le plus souvent se produit de sorte que l’on offense Dieu en ne voulant pas offenser son ami ; qu’il n’aurait pas dû agir ainsi, l’issue juste de la divine sentence le montra".

777 Item Augustinus: si deus peccatores non amaret: ad terram de coelo non descenderet. De même Augustin : "si Dieu n’aimait pas les pécheurs, il ne descendrait pas du ciel vers la terre".

778 E contrario eundem Augustinum citant alii in.li. de spiritu et anima ita dicentem: Propterea deus factus est homo ut totum hominem in se beatificaret: ut siue homo ingrederetur intus per intellectum: siue egrederetur extra per sensum: in creatore suo pascua inueniret. Pascua intus in cognitione deitatis: pascua foris in carne saluatoris. Au contraire d’autres citent le même Augustin dans le de Spritu et Anima qui déclare : "la raison pour laquelle Dieu s’est fait homme est de donner en lui la béatitude à l’homme entier de sorte que si l’homme entre en lui-même par l’intellect ou s’il sort hors de lui par les sens, il trouve sa nourriture dans son créateur, sa nourriture intérieure dans la connaissance de la divinité, sa nourriture extérieure dans la chair du sauveur".

779 Haec autem ratio ab Augustino inducta uidetur stare Lapsu humanae naturae circunscripto. Cette raison avancée par Augustin semble tenir dans les bornes de la chute de la nature humaine.

792 dicit enim diuus Augusti. super genesi. Renouabitur enim a uetustate non in corpus animale quale fuit: sed in melius id est spirituale: cum hoc mortale induet immortale: in quod mutandus erat Adam nisi morte corporis animalis peccando meruisset. En effet dans son Traité sur la Genèse le divin Augustin déclare : il sera en effet renouvelé de sa vieillesse non pas dans le corps animal dans lequel il a été mais dans un corps meilleur autrement dit spirituel, quand ce qui est mortel revêtira l’immortalité vers laquelle Adam aurait dû évoluer si en péchant il n’avait pas mérité la mort de son corps animal.

793 Quo (inquit et ex his uerbis quispiam) sors melior uenit de clade: cum etiam si cladis non uenisset: Augustinus dicat hominem in illam potissimam immortalitatem mutandum fuisse? Comment donc (dit quelqu’un à partir ce ces mots) sors melior uenit de clade ("un destin meilleur est venu du désastre"), puisque, même si le désastre n’était pas venu, Augustin affirme que l’homme aurait évolué vers cette si désirable immortalité ?

795 possumus respondere sors melior comparando tertium statum statui primo: ut augustinus ait: renouabitur: enim non in corpus animale quale fuit: Sed in melius. Voici ce que nous pouvons répondre : sors melior ("un destin meilleur"), en comparant le troisième état avec le premier, comme dit Augustin "il sera renouvelé" en effet non dans le corps animal dans lequel il a été, mais en mieux.

801 Concepit etiam Eua spiritum superbiae ut augustinus author est: dum non uult peccatum confiteri sed refert in alterum dicens: serpens decepit me et comedi: in impari sexu sed pari fastu. quia parem habuit fastum mulier cum uiro. Eve conçut aussi l’esprit d’orgueil, comme le garantit Augustin, en ne voulant pas avouer son péché mais en le rejetant sur l’autre en disant "le serpent m’a trompé et j’ai mangé", différente par le sexe, mais égale par la morgue car la femme avait la même morgue que l’homme.

864 Est autem pascere agnos et oues ut Augustinus ait: credentes ne deficiant confortare: terrena subsidia si necesse est: subditis prouidere: exempla uirtutum prebere: aduersariis obsistere: peccantes corrigere. Or être le berger des brebis et des agneaux c’est comme le dit Augustin : "réconforter les croyants pour qu’ils ne se découragent pas, si nécessaire fournir à ceux qui nous sont confiés des subsides matériels, leur offrir un exemple de vertus, s’opposer aux adversaires et corriger les pécheurs".

920 (Hebreo.) Sciendum illud quod Burgensis episcopus in additionibus matthei notat sapienter: scilicet hoc nomen hebreus non ab abraam declinari: cum abraam scribatur in principio per aleph: hebreus uero per eyn: Nec etiam ab heber dicitur hebreus: alioquin ammonitae et moabitae qui a loth sunt oriundi: et madianitae et edomitae et alii qui ab heber omnes sunt deriuati hebrei uocarentur. Dicitur ergo hebreus non ab abraham hoc est nomine proprio: Sed ab heber: quo fuit cognominatus abraam: id est a cognomento abraae non a nomine. abraam enim cum natus esset in mesopotamia ubi thare pater et cognati idolis seruiebant: diuina moderatione Eufratem fluuium transmisit: qui terminus est terrae promissionis: cumque in terram sanctam uenisset ad dei cultum coelesti numine segregatus: dictus est ab incolis hebreus ut in genesi uidemus id est transfluuialis: quia a mesopotamia quae est trans fluuium: in terram canaam uenerat. Hinc ipse hebreus et posteri hebrei dicti. Hoc notaui: quia apud elementarios authores non inuenitur: alioquin ut caetera protrita omittimus: ita hoc quoque silentio preteriissem. Quamuis autem dissentiat diuus augus . li. de ciuitate dei .xvi. non est mirum cum literas hebraicas nesciuerit. (Hebreo.) Il faut savoir ce que l’évêque de Burgos indique savemment dans ses Additions sur Matthieu : "le nom hebreus ne vient pas d’Abraham, puisque la première lettre du nom 'Abraham' est aleph alors que dans hebreus c’est aïn" ; hebreus ne vient pas davantage de Heber sinon les Ammonites et les Moabites qui devaient naître de Loth ainsi que les Madianites et les Edomites et tous ceux qui descendent de Heber seraient nommés Hébreux. Donc hebreus ne vient pas d’Abraham, c’est-à-dire du nom propre mais du surnom d’Abraham heber, autrement dit non pas du nom d’Abraham mais de son surnom. En effet, comme Abraham était né en Mésopotamie où son père Tharè et sa famille servaient les idoles, par un effet de la guidance divine, il traversa l’Euphrate qui est la limite de la terre promise, et quand il fut venu en terre sainte, une fois mis à part par la puissance du Ciel pour rendre à Dieu un culte, les habitants de ce lieu le nommèrent hebreus, comme nous le voyons dans la Genèse, autrement dit "qui vient de l’autre rive du fleuve", car il était venu de Mésopotamie qui est sur l’autre rive du fleuve en terre de Canaan. Voilà pourquoi on le nomma hebreus et ses descendants hebrei. J’ai fait cette note car on ne la trouve pas dans les auteurs de niveau élémentaire ; autrement les autres notations qui sont bien connues, nous les passons et ainsi j’aurais passé cela sous silence aussi. Bien que le divin Augustin en Civ. Dei 16 ne soit pas du même avis que l’évêque de Burgos, cela n’est pas étonnant car il ne savait pas l’hébreu.

933 Nos conuenit illud non nescire Graecos theologos Basilium: Nazianzenum: origenem: latinos quoque hieronymum Ambrosium Augustinum caeterosque obseruare ubique proprietates ipsorum numerorum: adeoque attente illos scrutari in quibusuis diuinae scripturae locis: ut non sit mirandum si Arator hic quoque tam diligens sit numeri duodenarii: tamque curiosus obseruator: Certe beda clarus interpres passim huius sententias in suas comentationes transfert. Il est important que nous n’ignorions pas que les théologiens grecs, Basile, Grégoire de Nazianze, Origène, et les théologiens latins aussi, Jérôme, Ambroise, Augustin et tous les autres, ont été attentifs partout aux propriétés des nombres eux-mêmes et les ont soumises à un examen si attentif dans quelque passage des Ecritures qu’ils les trouvent, qu’il n’y a rien d’étonnant à ce qu’Arator ici aussi montre tant de soin à expliquer le nombre douze et que cet observateur si plein de curiosité qu’est Bède, l’illustre commentateur, fasse passer partout les sentences de ce dernier dans son propre commentaire.

954 Si autem quispiam quaerat cur spiritus sanctus latenter dabatur ante christi glorificationem: cum postea in die pentecoste palam in apostolos descenderit exterius igneo calore: interius spirituali inspiratione se ostendens Augustinus in.li.lxxxiii. quae respondet: quia post manifestam declarationem diuinitatis christi congruebat: ut spiritus sanctus daretur manifestus. Ante enim nunquam sic spiritus sanctus apparuerat: ut eum datum homines faterentur: sicut dominus nondum erat clarificatus inter homines: quamuis aeterna eius clarificatio nunquam destiterit. Mais si quelqu’un cherche à savoir pourquoi l’Esprit saint était donné de manière cachée avant la glorification du Christ, alors qu’ensuite, au jour de la Pentecôte, il est descendu ouvertement sur les apôtres se montrant sous la forme extérieure de la chaleur d’un feu, et la forme intérieure d’une inspiration spirituelle, qu’il voie Augustin, Ep. 83, qui lui répond que c’est parce que, après la déclaration manifeste de la divinité du Christ, il était cohérent que l’Esprit saint fût donné de façon manifeste ; auparavant, en effet, jamais l’Esprit saint n’était apparu de manière à ce que les hommes confessent qu’il avait été donné, de même que le Seigneur n’avait pas encore été glorifié parmi les hommes, bien que sa glorification éternelle n’ait jamais eu de fin.

988 Hinc in sermone de plagis Augus. Ipse ignis purgauit potius quam cremauit: et super linguas refrigerio sanctificationis insedit: quia ipse flammas in camino restinxit. Nouit enim spiritus sanctus ignem facere amoenum qui reddidit amoenatum rorante flamma caminum: quique sanctificat patres: et nobis facit loqui coelestia piscatores et paulo postidem Delectat inquit conuenientes ex omni saeculo nationes apostolorum linguas attendere: et omnes sua labia recognoscere quia spiritus sanctus de diuersis nouit facere unitatem qui apostolos fecit toti saeculo concordantes. De là vient ce qu’écrit Augustin dans le sermon sur les plaies : " ce feu purifia plus qu’il ne brûla, et sur les langues il vint se placer avec le rafraîchissement de la sanctification, parce que lui-même éteignit ses flammes dans la fournaise. L’Esprit saint sait en effet rendre le feu agréable, lui qui rendit agréable la fournaise en y versant une rosée de flammes et qui sanctifie nos pères et fait pour nous parler des biens célestes des pêcheurs" et un peu plus loin "c’est un plaisir de voir toutes les nations se rassembler du monde entier pour prêter attention aux langues des apôtres et reconnaître tous leur langue sur leurs lèvres, parce que l’Esprit saint sait rendre l’unité à ce qui était divers, lui qui a fait que le concert apostolique soit en accord avec le monde entier.

1023 Nam ut inquit augustinus in sextodecimo libro de ciuitate dei: ista ciuitas quae appellata est confusio: ipsa est babylon: cuius mirabilis constructio gentium etiam historia comendatur. Babylon quippe confusio interpretatur: cuius nembroth gigantem fuisse conditorem: ut ibi tanquam in metropoli esset regni habitaculum: breuiter et obscure paulo superius innuit idem Moses. De fait comme le dit Augustin au livre 16 de la Cité de Dieu : "la cité qui fut appelée ‘confusion’ c’est la cité même de Babylone, dont l’histoire profane même rapporte l’admirable construction. En effet Babylone veut dire ‘confusion’ ; et le géant Nemrod en fut le fondateur pour y avoir le siège de son royaume pour ainsi dire comme dans une capitale, comme rapidement et de façon peu claire le même Moïse l’a laissé entendre un peu auparavant.

1025 Quia ut ait augus. in africa barbaras gentes in una lingua plurimas nouimus. C’est parce que, comme le dit Augustin, nous connaissons en Afrique plusieurs races barbares qui ont la même langue.

1027 Profecto auguus. li. xvi. de ciuitate dei: illam in hebreis mansisse putat: Cum quaeritur inquit in diuisione linguarum ubi lingua illa remanere potuerit quae fuit ante communis: quae sine ulla dubitatione non ibi remansit. ubi fuit illa poena quae est facta mutatione linguarum: quid aliud occurrit nisi quod in huiusmodi gente remansit a cuius nomine nomen accepit? et hoc iusticiae gentis huius non paruum apparuisse uestigium: quod cum aliae gentes plecterentur mutatione linguarum: ad istam non peruenit tale supplicium? et certe una est hebrea gens ex heber propagata usque ad abraam et. c. De fait, Augustin au livre 16 de la Cité de Dieu pense que cette langue originelle s’est maintenue chez les Hébreux : "quand on demande", écrit-il, "lors de la division des langues, où a pu subsister la langue qui était auparavant commune, sans aucun doute possible elle ne subsista pas là où eut lieu le châtiment qui s’opéra par le changement des langues ; que reste-t-il comme solution sinon le fait qu’elle subsista dans la race du nom de laquelle elle tira son nom et que cela est apparu comme un témoignage non négligeable de la justice de cette race, dans le fait qu’alors que toutes les autres races étaient frappés par le changement des langues, celle-ci ne fut pas atteinte par un tel supplice ? Et de fait il n’existe qu’une race hébraïque issue d’Héber et qui s’est poursuivie jusqu’à Abraham etc.".

1029 Sed quid de hoc sit sentiendum ex mea sententia: utrum scilicet ab heber hebrea lingua uel hebrei dicantur supra ostendi. Occurrit autem ambiguitas quam citat Augustinus super genesin: quo pacto uidelicet potuit illorum esse hominum tanta stoliditas ut crederent se aedificaturum ciuitatem et turrim usque in coelum. Si se inquit augus. hoc posse crediderunt nimium stulta audacia et impietas deprehenditur et quia ob hoc dei uindicta secuta est ut eorum linguae diuiderentur: non absurde hoc cogitasse creduntur. Mais quant à ce qu’il faut à mon avis penser sur ce sujet, à savoir si la langue hébraïque et les Hébreux tirent leur nom d’Héber, je l’ai déjà montré plus haut. Or il se fait jour une ambiguïté qu’Augustin relève dans son Traité sur la Genèse : comment ces gens ont-ils pu être assez fous pour croire qu’ils allaient construire une cité et une tour qui irait jusqu’au ciel ? "Si, écrit Augustin, ils s’en crurent capables, ils encourent le reproche d’une excessive sottise et impiété et, parce que la punition de Dieu pour cette idée en a été la conséquence ; de sorte que leurs langues se sont divisées, il n’est pas absurde de croire qu’ils ont eu une idée pareille".

1029 Sed quid de hoc sit sentiendum ex mea sententia: utrum scilicet ab heber hebrea lingua uel hebrei dicantur supra ostendi. Occurrit autem ambiguitas quam citat Augustinus super genesin: quo pacto uidelicet potuit illorum esse hominum tanta stoliditas ut crederent se aedificaturum ciuitatem et turrim usque in coelum. Si se inquit augus. hoc posse crediderunt nimium stulta audacia et impietas deprehenditur et quia ob hoc dei uindicta secuta est ut eorum linguae diuiderentur: non absurde hoc cogitasse creduntur. Mais quant à ce qu’il faut à mon avis penser sur ce sujet, à savoir si la langue hébraïque et les Hébreux tirent leur nom d’Héber, je l’ai déjà montré plus haut. Or il se fait jour une ambiguïté qu’Augustin relève dans son Traité sur la Genèse : comment ces gens ont-ils pu être assez fous pour croire qu’ils allaient construire une cité et une tour qui irait jusqu’au ciel ? "Si, écrit Augustin, ils s’en crurent capables, ils encourent le reproche d’une excessive sottise et impiété et, parce que la punition de Dieu pour cette idée en a été la conséquence ; de sorte que leurs langues se sont divisées, il n’est pas absurde de croire qu’ils ont eu une idée pareille".

1036 dicit autem turrim ut augus. ait. xvi. de ciui. dei: uel quia una erat turris quam praecipue moliebantur inter alias: uel quia plures quae per numerum singularem ita significatae sunt: ut dicitur milies et intelliguntur millia millium: ut rana et locusta et intelligitur multitudo ranarum et locustarum in plagis quibus aegyptii percussi sunt per moysen. Il dit turrim ("une tour"), comme le dit Augustin au livre 16 de la Cité de Dieu soit parce qu’il n’y avait qu’une seule tour sur laquelle ils travaillaient de préférence aux autres, soit parce que plusieurs tours sont désignées par un singulier comme on dit 'mille fois' et que l’on comprend des milliers de milliers, comme on dit 'la grenouille et la sauterelle' et on comprend une multitude de grenouilles et de sauterelles dans les plaies qui frappèrent les Egyptiens par l’entremise de Moïse.

1046 dicit autem recolligit sumpta metaphora ab his qui grana spargunt quae alii recolligunt. Nam linguae erant simul in una lingua id est hebrea ut augus. arbitratur: has sparserunt et diuiserunt superbi in .lxxii. linguas: quas humiles apostoli recollegerunt et in unam reduxerunt: ac fortassis hebrea lingua utentes ab omnibus intelligebantur: ut ante turrim hebrea homines utebantur: et omnes intelligebant e diuersoque intelligebantur ab omnibus. Il dit recolligit ("rassemble à nouveau"), en prenant une métaphore des gens qui jettent le grain que d’autres rassemblent ensuite de nouveau ; de fait les langues étaient ensemble en une seule langue, autrement dit l’hébreu, comme le pense Augustin ; les orgueilleux les séparèrent et divisèrent en soixante-douze langues que les humbles apôtres rassemblèrent à nouveau et ramenèrent à l’unité, et il pourrait bien se faire que ce soit en se servant de l’hébreu qu’ils aient été compris par tous, comme, avant la tour, les hommes utilisaient l’hébreu, et tous comprenaient tout le monde et étaient compris par tous d’où qu’ils vinssent.

1085 Et secundum hanc sententiam expone: (nec corrumpuntur) id est deprauantur scilicet apostoli: acerbo scilicet liquore id est aqua insipida uel acerba anteaquam in uinum conuerteretur: nam racemus uel uua non matura continet aquam acerbam: uel insipidam. posteaquam uero matura est uua dulcescit: quo scilicet liquore acerbo lacus id est hydriae illae sex secundum purificationem iudaeorum ut narrat loan. maduere id est maduerunt et plenae fuerunt. per .vi. lacus id est sex receptacula aquae ut ait augus. sex aetates intelligimus quarum fines statuuntur Adam: Noe: Abraam: Dauid: Transmigratio babylonis: loannes baptista: Finis mundi. in singulis aetatibus aliquid inuenies quod sapiat aquam acerbam uel insipidam si literae tantum hoc est phariseorum expositioni adhaerescas: aliquid etiam quod uinum dulce sapiat si spiritum uiuificantem sequare. Et c’est ainsi que vous expliquerez la phrase (nec corrumpuntur) autrement dit ils ne sont pas abîmés, évidemment les apôtres, acerbo ("par l’aigre") évidemment le liquide, autrement dit l’eau sans saveur et aigre avant qu’elle ne soit changée en vin ; mais le sarment, voire la vigne, avant maturité contiennent une eau aigre ou au mieux sans saveur, mais quand la vigne a mûri, elle s’adoucit ; quo ("duquel") évidemment ce liquide aigre, lacus (" les cuves") autrement dit les six hydries destinées à la purification des Juifs comme le raconte Jean, maduere ("sont imprégnées"), autrement dit maduerunt, et étaient pleines. Avec les six cuves, autrement dit les six contenants d’eau, comme le dit Augustin, nous comprenons les six âges dont les limites sont définies ainsi : Adam, Noé, Abraham, David, l’exil à Babylone, Jean Baptiste, la fin du monde. Dans chacun de ces âges, on trouvera quelque élément qui renvoie au goût de l’eau amère et sans saveur, si l’on ne s’attache qu’à la lettre, autrement dit au commentaire des pharisiens, mais aussi quelque élément qui a le goût du vin doux si l’on suit l’Esprit qui vivifie.

1164 (Deus omnipotens) id est sanctissima trinitas: quae in omnibus effectibus principaliter opatur: secundum regulam illam theologicam: omnia praedicamenta dicta de deo transeunt in substantiam: excepta relatione: quae ratione subiecti in quo est: transit in substantiam ne faciat compositionem: ratione uero termini ad quem est: manet: ut faciat distictionem. Quamuis autem dicat augus. intelligamus deum quantum possumus sine quantitate magnum:sine qualitate bonum: et caetera: atque ita illas uoces communissimas deo procul abigat tamen quia alias non habemus: quibus dei explicemus inefabilia opera: nisi sit relatio: uel aliquod consequens personam peculiariter (sicut mittere et non mitti patri competit: et e diuerso mitti et non mittere spiritui sancto: At filio utrumque congruit scilicet mitti et mittere: congruit et incarnari soli filio:) nisi ergo sint uel relationis nomina: uel horum peculiares quaedam appendices: licet attribuantur singulae cuique personae multa: in communionem tamen ueniunt trium personarum. Vt cum dicimus christum conceptum et natum de spiritu sancto: non dicimus spiritum sanctum christi patrem: nam et capillus ex nobis dicitur nasci: qui non uocatur noster filius: et qui ex aqua et spiritu nascuntur: non sunt filii aquae (ut ait magister in iii.) quamuis ergo spiritus sancti dicatur opus: christi incarnatio: sicut in euangelio dicitur de maria: inuenta est in utero habens de spiritu sancto: tamen illam creaturam: quam uirgo concepit et peperit: tota unitas fecit et operata est. Nec enim inseperabilia sunt opera trinitatis: quin imo nominato uno tres intelliguntur iuxta eam regulam quam proposuimus: atque ita quoque resurrectionem christi beatissima trinitas peregit: et assumptionem admirabilem: et reliqua opera coelestia. (Deus omnipotens), autrement dit la très sainte Trinité, qui agit de manière principale dans tout ce qui est effectué, conformément à cette règle théologique : tous les prédicats que l’on attribue à Dieu se changent en sa substance, à l’exception de la relation, qui, à raison du sujet dans lequel elle se trouve, se change en substance, afin de ne pas opérer de composition, mais, à raison du terme vers lequel elle tend, demeure à sa place pour opérer une distinction. Bien que, cependant, Augustin dise "nous comprenons Dieu à la mesure de notre capacité comme grand sans quantité et bon sans qualité etc.", et bien qu’il repousse ces paroles loin de Dieu comme absolument triviales, cependant, parce que nous n’en avons pas d’autres pour expliquer les œuvres ineffables de Dieu, sinon de dire que c’est une relation, autrement dit quelque chose qui concerne une personne en particulier (comme envoyer sans être envoyé convient au Père, au contraire être envoyé sans envoyer convient au saint Esprit, mais les deux s’adaptent au Fils, à la fois être envoyé et envoyer, mais s’incarner s’adapte au seul Fils) ; si donc il n’existe pas de noms pour la relation, autrement dit d’ajouts particuliers apportés aux personnes de la Trinité, on peut bien attribuer beaucoup à chaque personne, ces attributs finissent cependant par être communs aux trois personnes. Ainsi, quand nous disons que le Christ a été conçu et est né du saint Esprit, nous ne disons pas que le saint Esprit est le père du Christ (de fait on dit que les cheveux naissent de nous, mais on ne les appelle pas pour autant fils) ; et ceux qui naissent de l’eau et de l’esprit ne sont pas les fils de l’eau (comme le dit le Maître au livre 3) ; donc, même si la naissance du Christ est dite œuvre du saint Esprit, comme on le dit dans l’évangile à propos de Marie, "elle se trouva enceinte sous l’action du saint Esprit", cependant la créature que la vierge a conçue et engendrée, c’est l’unité tout entière de la Trinité qui l’a faite et réalisée. En effet, les œuvres de la Trinité ne sont pas inséparables : tout au contraire, en nommant un on comprend trois, selon la règle que nous avons proposée, et on comprend aussi le fait qu’ainsi également c’est la très bienheureuse Trinité qui a accompli la résurrection du Christ et son admirable ascension et le reste des œuvres célestes.

1209 Ibidem etiam ait magister apostolos in nomine trinitatis baptizasse: licet hoc non sit scriptum. indidit autem agni titulum baptista domino iesu: et hic poeta illud idem cognomentum repetiuit: quia authore Augustino tria ministrat hic agnus immaculatus possidentibus se: lac simplicis doctrinae quo paruuli nutriuntur: lanam id est incrementa uirtutum: et esum carnis suae. Recte quoque agnus monstratur. quia erat innocens: immaculatus: immolandus: praefiguratus in agno paschali. Dans le même passage, le Maître dit aussi que les apôtres ont baptisé au nom de la Trinité, bien que cela ne soit pas dans l’Ecriture. Le Baptiste donna en outre au Seigneur Jésus le titre d’agneau, et ici le poète reprend ce même surnom, parce que, selon l’autorité d’Augustin, cet agneau immaculé apporte trois dons à ceux qui le possèdent : le lait de la simple doctrine, qui nourrit les tout-petits, la laine, autrement dit l’accroissement des vertus, et sa chair à manger. C’est juste aussi de le montrer comme agneau, car il était innocent, immaculé et voué à être sacrifié, ce qui était préfiguré dans l’agneau pascal.

1226 Aliter tamen aetates sex computamus authore augustino ab adam usque ad noe: ad abraam: ad dauid: ad transmigrationem babylonis: ad ioannem baptistam: ad finem mundi. Nous pouvons cependant adopter un autre comput, dont Augustin est le garant : d’Adam jusqu'à Noé, puis jusqu'à Abraham, puis jusqu'à David, puis jusqu'à la déportation à Babylone, puis jusqu'à Jean Baptiste, puis jusqu'à la fin du monde.

1241 et quia (ut in quadam ad hieronymum epistula ait augus.) plenitudo legis caritas est: qua deus proximusque diligitur: in quibus praeceptis caritatis tota lex pendet et prophetae: non iniuria arator ait per cunctos sensus gratiam spiritus sancti fuisse diffusam in corda credentium: qui adeo se amabant ut simul essent omnia omnibus communia. ut per dilectionis donum bona temporaria nihili facerent: thesaurizantes in coelo uera bona. atque ita per unam charitatis uirtutem omnis simul uirtutes comprehenderent. Et parce que (comme le dit Augustin dans une lettre à Jérôme) la plénitude de la loi c’est la charité, qui fait que l’on aime Dieu et le prochain, préceptes dont dépendent toute la loi et les prophètes, ce n’est pas à tort qu’Arator dit que c’est per cunctos sensus ("à travers tous les sens) que la grâce de l’Esprit saint s’est diffusée dans le cœur des croyants qui s’aimaient à tel point qu’ils avaient tout en commun de sorte que, par le don de la charité, il ne faisaient plus aucun cas des biens temporaires, mais se faisaient un trésor dans le ciel des vrais biens, et ainsi, par la seule vertu de charité, ils embrassaient d’un coup toutes les vertus.

1266 Nam augus. super epistulam Ioannis. radix inquit omnium malorum est cupiditas: et radix omnium bonorum est charitas. simul ambæ esse non possunt. nisi una radicitus euulsa fuerit: alia plantari non potest. sine causa conatur aliquis ramos incidere: si radicem non contendit euellere. De fait, Augustin, en commentant la lettre de Jean, dit : "la racine de tous les maux, c’est la cupidité et la racine de tous les biens c’est la charité ; les deux ne peuvent aller ensemble ; sans que l’une des deux ne soit totalement arrachée, l’autre ne peut s’implanter ; quelqu’un tente de couper sans raison des branches, s’il ne s’efforce pas d’enlever la racine".

1277 Quid? nonne augustinus in li. de natura et gratia gratiam scripsit praeuenire ut pie uiuamus: subsequi uero ut cum illa uiuamus. per subsequentem gratiam significans gloriam? An non ibidem ostendit aquila hipponensis gratiam unam esse: cum tamen multa in anima operetur. ipsa enim animam efficit sponsam christi et filiam patris aeterni: et templum spiritus sancti. Ipsa animam purgat: illuminat: perficit: uiuificat: reformat: et stablilit: eleuat: assimilat: deo coniungit. Hé quoi ? Augustin dans son livre sur la nature et la grâce n’a-t-il pas écrit que la grâce nous devance pour nous faire vivre pieusement, mais qu’elle nous suit pour que nous vivions en sa compagnie, signifiant, par la grâce subséquente, notre gloire ? N’est-il pas exact qu’au même endroit l’Aigle d’Hippone montre que la grâce est une, alors même qu’elle opère dans l’âme des œuvres multiples : c’est en effet elle qui fait de l’âme l’épouse du Christ, la fille du Père éternel, et le temple de l’Esprit saint ; c’est elle qui purifie l’âme, l’illumine, la rend parfaite, la fait vivre, la reforme, l’établit solidement, l’élève, l’assimile et l’unit à Dieu.

1277 Quid? nonne augustinus in li. de natura et gratia gratiam scripsit praeuenire ut pie uiuamus: subsequi uero ut cum illa uiuamus. per subsequentem gratiam significans gloriam? An non ibidem ostendit aquila hipponensis gratiam unam esse: cum tamen multa in anima operetur. ipsa enim animam efficit sponsam christi et filiam patris aeterni: et templum spiritus sancti. Ipsa animam purgat: illuminat: perficit: uiuificat: reformat: et stablilit: eleuat: assimilat: deo coniungit. Hé quoi ? Augustin dans son livre sur la nature et la grâce n’a-t-il pas écrit que la grâce nous devance pour nous faire vivre pieusement, mais qu’elle nous suit pour que nous vivions en sa compagnie, signifiant, par la grâce subséquente, notre gloire ? N’est-il pas exact qu’au même endroit l’Aigle d’Hippone montre que la grâce est une, alors même qu’elle opère dans l’âme des œuvres multiples : c’est en effet elle qui fait de l’âme l’épouse du Christ, la fille du Père éternel, et le temple de l’Esprit saint ; c’est elle qui purifie l’âme, l’illumine, la rend parfaite, la fait vivre, la reforme, l’établit solidement, l’élève, l’assimile et l’unit à Dieu.

1288 Nihil facilius: si Augustini uerba libro de trinitate. xv. adduxerimus in patrocinium: quæ magister quoque in primo repetiuit: ad quæ hic uidetur Arator alludere: Dilectio (inquit lucerna supra candelabrum hipponensis ecclesiæ olim posita et lucem ueritatis a confusione tenebrarum splendore clarifici sermonis pulsis undique caliginibus longe lateque enubilans) dilectio inquit dei diffusa est in cordibus nostris (ut ait apostolus) per spiritum sanctum: qui datus est nobis. nullum est isto dono dei excellentius. Solum est quod diuidit inter filios regni: et filios perditionis. Dantur et alia per spiritum munera : sed sine charitate nihil prosunt. Nisi ergo tantum impertiatur cuiquam spiritus sanctus: ut eum dei et proximi faciat amatorem: a sinistra non transfertur ad dexteram. Nec spiritus sanctus proprie dicitur donum: nisi propter dilectionem: quam qui non habuerit: etsi loquatur omnibus linguis: et habuerit prophetiam: et omnem scientiam: et omnem fidem: et distribuerit substantiam suam: et tradiderit corpus suum ita ut ardeat: non ei prodest. Quantum ergo bonum est: sine quo ad æternam uitam neminem tanta bona perducunt? Ipsa uero dilectio uel charitas (nam unius rei nomen est utrunque) perducit ad regnum. Rien de plus facile, si nous nous appuyons sur les paroles d’Augustin au livre 15 du de Trinitate, que le Maître a rappelé dans son livre 1 et auxquelles Arator semble ici faire allusion : "l’amour" (dit la lumière jadis posée sur le lampadaire de l’église d’Hippone, qui éclaire de la lumière de la vérité avec son discours qui dissipe la confusion des ténèbres, en repoussant en tout sens les nuées) : "l’amour de Dieu", dit-il donc, "se diffuse dans nos cœurs, comme le dit l’Apôtre, par l’Esprit saint qui nous a été donné ; il n’est rien de plus excellent que ce don de Dieu. C’est lui, et lui seul, qui fait le départ entre fils du royaume et fils de perdition. L’Esprit donne aussi d’autres présents, mais sans la charité, ils ne servent à rien. Donc, si une personne ne reçoit pas le don de l’Esprit saint qui le fera aimer Dieu et son prochain, il ne passe pas de la gauche vers la droite. Et l’Esprit saint n’est pas proprement appelé un don, si ce n’est en raison de l’amour, car celui qui n’a pas l’amour, même s’il parlait toutes les langues et avait le don de prophétie et toute la science et toute la foi et distribuerait ses biens et livrerait son corps pour qu’il soit brûlé, cela ne lui sert à rien. Qu’il est donc grand ce bien sans lequel de si grands biens ne conduisent personne à la vie éternelle ? Cet amour même", ou plutôt cette charité (car il n’y a qu’un nom pour les deux) "conduit au Royaume".

1288 Nihil facilius: si Augustini uerba libro de trinitate. xv. adduxerimus in patrocinium: quæ magister quoque in primo repetiuit: ad quæ hic uidetur Arator alludere: Dilectio (inquit lucerna supra candelabrum hipponensis ecclesiæ olim posita et lucem ueritatis a confusione tenebrarum splendore clarifici sermonis pulsis undique caliginibus longe lateque enubilans) dilectio inquit dei diffusa est in cordibus nostris (ut ait apostolus) per spiritum sanctum: qui datus est nobis. nullum est isto dono dei excellentius. Solum est quod diuidit inter filios regni: et filios perditionis. Dantur et alia per spiritum munera : sed sine charitate nihil prosunt. Nisi ergo tantum impertiatur cuiquam spiritus sanctus: ut eum dei et proximi faciat amatorem: a sinistra non transfertur ad dexteram. Nec spiritus sanctus proprie dicitur donum: nisi propter dilectionem: quam qui non habuerit: etsi loquatur omnibus linguis: et habuerit prophetiam: et omnem scientiam: et omnem fidem: et distribuerit substantiam suam: et tradiderit corpus suum ita ut ardeat: non ei prodest. Quantum ergo bonum est: sine quo ad æternam uitam neminem tanta bona perducunt? Ipsa uero dilectio uel charitas (nam unius rei nomen est utrunque) perducit ad regnum. Rien de plus facile, si nous nous appuyons sur les paroles d’Augustin au livre 15 du de Trinitate, que le Maître a rappelé dans son livre 1 et auxquelles Arator semble ici faire allusion : "l’amour" (dit la lumière jadis posée sur le lampadaire de l’église d’Hippone, qui éclaire de la lumière de la vérité avec son discours qui dissipe la confusion des ténèbres, en repoussant en tout sens les nuées) : "l’amour de Dieu", dit-il donc, "se diffuse dans nos cœurs, comme le dit l’Apôtre, par l’Esprit saint qui nous a été donné ; il n’est rien de plus excellent que ce don de Dieu. C’est lui, et lui seul, qui fait le départ entre fils du royaume et fils de perdition. L’Esprit donne aussi d’autres présents, mais sans la charité, ils ne servent à rien. Donc, si une personne ne reçoit pas le don de l’Esprit saint qui le fera aimer Dieu et son prochain, il ne passe pas de la gauche vers la droite. Et l’Esprit saint n’est pas proprement appelé un don, si ce n’est en raison de l’amour, car celui qui n’a pas l’amour, même s’il parlait toutes les langues et avait le don de prophétie et toute la science et toute la foi et distribuerait ses biens et livrerait son corps pour qu’il soit brûlé, cela ne lui sert à rien. Qu’il est donc grand ce bien sans lequel de si grands biens ne conduisent personne à la vie éternelle ? Cet amour même", ou plutôt cette charité (car il n’y a qu’un nom pour les deux) "conduit au Royaume".

1291 Idem quod Augustinus in libris de doctrina xpiana et enchiridio fere his uerbis : totam inquit magnitudinem et amplitudinem diuinorum eloquiorum possidet charitas: qua deum proximumque diligimus. Vnde ueritas ait: in his duobus mandatis uniuersa lex pendet et prophetæ. Si ergo non uacat omnes paginas sanctas perscrutari: omnia inuolucra sermonum euoluere: tene charitatem: ubi pendent omnia: quia perfectio est et finis omnium. C’est exactement ce que dit Augustin dans le de Doctrina Christiana et dans l’Enchiridion à peu près en ces mots : "toute la grandeur", dit-il, "et l’immensité de la divine éloquence, la charité les possède elle qui nous fait aimer Dieu et le prochain". D’où vient que la Vérité dit : "en ces deux commandements réside toute la loi et les prophètes". Si donc tu n’as pas le temps de regarder en détail toutes les pages de la sainte Ecriture, de dérouler tous les voiles de ses propos, garde la charité, tout dépend de là, car c’est la perfection et le but de tout.

1298 Sed scire uoles quid uocem hic charitatem: respondeo uerbis augustini in .iii. de doctrina chr.libro : charitatem uoco nutum animi ad fruendum deo proprium: et se ac proximo propter deum: et in libro de moribus ecclesiæ : charitas (inquit) dei dicta est uirtus quæ animi nostri rectissima affectio est : quæ coniungit nos deo: qua eum diligimus. Mais tu voudras savoir ce que j’appelle ici charité ; je réponds avec les mots d’Augustin au livre 3 du de Doctrina christiana : "j’appelle charité le mouvement de l’âme pour jouir de Dieu en propre et de soi-même et du prochain à cause de Dieu" ; et dans le de Moribus ecclesiae : "la charité", dit Augustin, "de Dieu se dit de la vertu qui est l’amour le plus droit dans notre esprit, celui qui nous unit à Dieu et par lequel nous l’aimons".

1300 Dicet idem author diuinus: charitas dei dicta est diffundi in cordibus nostris: non qua ipse nos diligit : sed qua nos diligere facit. Le même auteur divin va te le dire : on dit que la charité de Dieu se diffuse dans nos cœurs, non celle par laquelle il nous aime lui-même, mais celle par laquelle il nous fait aimer.

1303 Illud ergo hic breuiter repetamus (gratia) id est charitas et dilectio per excellentiam. Nam (ut augustinus ait in libro de moribus ecclesiæ: tractans illud uerbum apostoli: nec mors nec uita poterit nos separare a charitate dei ) si nulla res ab eius charitate nos separat: quid esse non solum melius Sed etiam certius hoc bono potest: Voici donc une brève récapitulation : (gratia ("la grâce")) autrement dit la charité et l’amour par excellence ; de fait (comme le dit Augustin dans le de Moribus Ecclesiae quand il traite de cette parole de l’Apôtre, "ni la mort, ni la vie ne pourront nous séparer de la charité de Dieu") si rien ne nous sépare de sa charité, que peut-il y avoir non seulement de meilleur mais même de plus certain que ce bien-là ?

1328 Ergo si attendis uerba aratoris. ipse Augustinum sequitur: qui in sermone de ascensione: Arbitror inquit ideo spiritum sanctum bis datum semel in terra: et iterum de cœlo: ut comendarentur nobis duo præcepta charitatis scilicet dei et proximi. Vna est charitas: et duo præcepta. unus spiritus: et duo data. quia alia charitas non diligit proximum: nisi illa quæ diligit deum. Qua ergo charitate proximum diligimus: ipsa deum diligimus. Sed quia aliud est deus: aliud est proximus: etsi una charitate diliguntur: ideo forte duo præcepta dicuntur: et alterum maius: et alterum minus : uel propter duos motus qui in mente geruntur: dum deus diligitur et proximus. Mouetur enim mens ad diligendum deum. mouetur et ad diligendum proximum. et multo magis erga deum quam erga proximum. et cetera. Donc, si vous prêtez attention aux paroles d’Arator, celui-ci suit Augustin qui dans son Sermon sur l’Ascension déclare : "je crois que la raison pour laquelle l’Esprit saint a été donné deux fois, une fois sur terre et ensuite du ciel, est de nous recommander les deux préceptes de la charité, évidemment envers Dieu et envers le prochain. Il n’y a qu’une seule charité, deux préceptes mais un seul Esprit, et deux dons ; car aucune des deux charités n’aime son prochain si ce n’est celle qui aime Dieu, et, par la charité qui nous fait aimer le prochain, nous aimons Dieu ; mais parce que Dieu est une chose et le prochain une autre, même s’ils sont aimés par une seule et même charité, voilà la raison peut-être pour laquelle on dit qu’il y a deux préceptes, un plus grand et un plus petit ; ou alors c’est en raison des deux mouvements qui s’opèrent dans notre esprit quand Dieu et le prochain sont aimés ; en effet l’esprit est poussé à aimer Dieu et il est aussi poussé à aimer le prochain, et l’amour est bien plus grand qui s’exerce envers Dieu que celui qui s’exerce envers le prochain" etc.

1329 sed dices: cur in terra datur spiritus? (ut utar Augustini uerbis) ideo datur ut diligatur proximus: et a cœlo datur spiritus : ut et deus diligatur. atque ita per spiritum datum in terra terreni dilectio: et per spiritum datum e cœlo dilectio coelestis dei commendatur. Mais vous allez me dire : pourquoi l’Esprit est-il donné sur terre ? En me servant des mots d’Augustin, je dirai qu’il est donné pour faire aimer le prochain et l’Esprit est donné du ciel pour faire aimer Dieu ; et ainsi, par l’Esprit qui est donné sur terre nous est confié l’amour d’une réalité terrestre, et par l’Esprit qui est donné du ciel, l’amour de Dieu, qui est un être céleste.

1352 In quo sequitur Augustinum quem paulo ante allegauimus. En cela, il suit Augustin auquel nous avons fait allusion un peu plus haut.

1359 Hæc regula ut ait Augustinus. dilectionis diuinitus constituta est: ut deum propter sese ex toto corde: et proximum diligas sicut te ipsum id est ad quod et propter quod te ipsum diligere debes. Cette règle d’amour, comme le dit Augustin, a été établie par Dieu, en sorte que l’on aime Dieu pour lui-même de tout son cœur et son prochain comme soi-même, autrement dit en vue de ce pour quoi on doit s’aimer soi-même et à cause de quoi on le fait.

1367 Nam cum sint quatuor diligenda: unum quod supra nos est scilicet deus: alterum quod nos sumus id est anima nostra : tertium quod iuxta nos est id est proximus: quarto loco nostrum corpus ab augustino collocatur . De fait, il y a quatre réalités que nous devons aimer : l’une qui est au-dessus de nous, évidemment Dieu, la deuxième que nous sommes nous, autrement dit notre âme, la troisième qui est à côté de nous, autrement dit le prochain et en quatrième lieu Augustin met notre corps.

1830 Præclare enim Augustinus: quisquis inquit potest intelligere uerbum: non solum antequam sonet: uerum etiam antequam sonorum eius imagines cogitatione inuoluantur: potest uidere aliquam eius uerbi similitudinem: De quo dictum est: in principio erat uerbum. Remarquable est en effet la parole d'Augustin : "toute personne qui peut concevoir une parole non seulement avant qu'elle ne résonne, mais même avant que les images de sa sonorité future soient présentes dans l'intellect, peut percevoir quelque ressemblance avec la parole dont il a été dit : 'Au commencement était le Verbe'".

1834 Nam (ut Augustinus sentit) ut nos per simplicem intelligentiam formamus conceptum diffinitiuum de tota essentia rei: quod uerbum dicitur explicare totam essentiam rei : ita deus ab æterno intelligendo se: dicit uerbum de tota memoria sua fœcunda: hoc est essentia: diffiniens et comprehendens totam essentiam: et substantiam suam: et plenitudinem suæ deitatis: et pelagus omnium perfectionum suarum. Nam cum illud uerbum sit de tota substantia ipsius dicentis: in eo sunt et apparent omnes diuinæ perfectiones: et ideæ omnium rerum: Deus enim pater per illud uerbum diffinit: et comprehendit se ipsum secundum totam plenitudinem suæ diuinitatis perfectionisque: atque ita infinite se ipsum comprehendit et diffinit: De fait, selon l'opinion d'Augustin, "de même que nous, par l'entremise de notre simple intelligence, formons un concept définitoire au sujet de l'essence toute entière d'une chose, et que ce mot, dit-on, explique la totalité de l'essence de la chose, de même Dieu, de la compréhension éternelle qu'il a de lui-même dit une parole au sujet de la totalité de sa mémoire féconde, autrement dit son essence, qui définit et embrasse la totalité de son essence, de sa substance, de la plénitude de sa déité, et de l'océan de toutes ses perfections ; de fait, comme cette parole est au sujet de la totalité de la substance de celui qui la dit, en elle se manifestent toutes les perfections divines, et les idées de tout ce qui existe ; en effet Dieu le Père se définit par cette parole, et s'embrasse lui-même selon la totalité de sa divinité et de sa perfection, et ainsi il s'embrasse et se définit lui-même de manière infinie.

1837 Et Augustinus: quicquid inquit scitur: scientis scientia comprehenditur: et scientis comprehensione finitur. Et Augustin dit : "tout ce qui est connu est embrassé par la connaissance de celui qui connaît et borné par la compréhension de celui qui connaît".

1862 Vnde augustinus in libro .lxiii. quaestionum: Quod inquit græce logos dicitur: latine et rationem: et uerbum significat. Sed hoc loco melius uerbum interpretamur. ut significetur non solum ad patrem respectus: sed ad illa etiam: quæ per uerbum facta sunt: operatiua potentia. Ratio autem: et si nihil per illam fiat: recte ratio dicitur. De là vient qu'Augustin dans le Livre des 83 questions déclare : "ce qu'en grec on nomme λόγος, signifie en latin à la fois parole et raison ; mais ici il vaut mieux comprendre parole, pour que le sens porte non seulement sur le Père, mais aussi sur tout ce qui a été créé par l'intermédiaire du Verbe, par sa puissance opérative ; or la raison, même si, par son intermédiaire, rien n'est produit, reste nommée à bon droit raison.

1960 et quamuis (ut augustinus author est) tota trinitas sit creatrix. et opera trinitatis sint indiuisa in creatione rerum: tamen modus est distinctus. Et bien que (comme l'assure Augustin) la totalité de la Trinité soit créatrice, et que l'ouvrage de la Trinité soit indivis dans l'acte de création du monde, cependant le mode de création est distinct.

2046 Deus enim (ut sapienter Augustinus ait) creator est omnium rerum: qui ubi et quando creare quid oporteat uel oportuerit: ipse nouit: sciens uniuersitatis pulchritudinem: quarum partium uel similitudine uel diuersitate contexat. Dieu, en effet, comme le dit avec sagesse Augustin, "est le créateur de tout, qui sait lui-même où et quand il faut ou il a fallu créer, car il connaît la beauté de l'ensemble dont il tisse ensemble les parties dans leur ressemblance ou leur diversité".

2067 Diuus enim Augustinus ait deum extra se ipsum: nec quicquam intueri. Le divin Augustin dit en effet que Dieu ne voit rien "à l'extérieur de lui-même".

2073 Vnde boetius: qui tempus inquit ab æuo ire iubes: et augustinus ait: uno ictu mentis omne simul tempus deum intueri. C'est ce qui fait écrire à Boèce : "c'est toi qui ordonnes au temps d'aller dans son déroulement" et à Augustin que d'un seul coup de son esprit Dieu embrasse du regard la totalité du temps.

2089 Illud Augustini erit multo satius huc adducere ut sequentia Aratoris uerba explicentur. uniuersas inquit creaturas et spirituales et corporales: non quia sunt ideo nouit deus sed ideo sunt: quia nouit. Il suffira largement de citer cette phrase d'Augustin pour expliquer les mots suivants d'Arator ; Augustin écrit : "toutes les créatures, spirituelles et corporelles, Dieu ne les connaît pas parce qu'elles sont, mais elle sont parce que Dieu les connaît".

2100 non inquam hos uel illos sequimur: Sed coelestem augustinum: qui ait ideas esse principales quasdam formas: uel rationes rerum stabiles atque incommutabiles: quæ ipsæ formatæ non sunt: ac per hoc semper æternæ: ac semper eodem modo sese habentes: quæ in diuina intelligentia continentur. Non, dis-je, je ne suivrai l'autorité ni des uns ni des autres, mais le céleste Augustin, qui dit que les idées sont des formes principes ou la rationalité stable et immuable des choses, qui elles-mêmes n'ont pas de forme, mais se comportent toujours de la même manière et sont contenues dans l'intelligence divine.

2106 Hæc uerba Augustini satis aperte uersui Aratoris possunt accommodari: ut dicamus creas formas rerum. scilicet eas per quas res perficiuntur et terminantur. quasi quibusdam notis: per nomina id est per omnes illas stabiles: quæ ita repræsentant res et notant: ut nomina uel uocalia uel intellectualia repræsentant res tanquam symbola et notæ rerum. Ces considérations d'Augustin peuvent assez ouvertement s'appliquer au vers d'Arator, et ainsi nous pouvons dire creas formas rerum ("tu crées les formes des choses") évidemment celles par lesquelles les choses sont achevées et définies, comme par quelques signes, per nomina ("par leurs noms") autrement dit par ces rationalités stables qui représentent et marquent les choses, de sorte que des noms, dans le langage ou dans l'intellect, représentent ces choses comme des symboles et des signes.

2112 Sed earum uisioni non quælibet anima nostra philosophi ethnici mens: sed sancti uiri (ut augustinus autumat) idonea est. Mais cette vision n'est pas adaptée à n'importe quelle âme, l'esprit d'un philosophe païen, mais à un saint homme (comme l'affirme Augustin).

2128 Augustinus nodum hunc explicat: et ego supra hoc ipsum enodaui. Augustin résout ce nœud, et moi aussi, ci-dessus, j'ai exposé ce même point.

2245 Atque ita (ut augustinus ait) in secundo et tertio die iiii elementa in proprias formas uidentur esse distincta. Et ainsi, comme le dit Augustin, aux deuxième et troisième jours, les quatre élément semblent avoir été distincts pour donner des formes propres.

2250 Nam licet dicat sapiens: qui uiuit in æternum creauit omnia simul: et augustinus sex dies exponat: non secundum successionem temporis: sed secundum cognitionem angelicam relatam ad sex genera rerum conditarum: quæ in genere proprio habita uespertina dicitur: quia omnis creatura luci æternæ composita: nox est et caligo: ut non inerudite dixerit cordubensis poeta: uidit quanta sub nocte iaceret nostra dies quæ rursus cognitio angelorum in uerbo et in diuina luce: quæ est uerissima et per essentiam: dicatur matutina. De fait, bien que Ben Sira le sage dise : "celui qui vit dans l'éternité a créé toute chose ensemble", et qu'Augustin explique les six jours non selon la succession temporelle, mais selon la connaissance angélique relative aux six générations de choses créées, qui, tenues dans un genre qui leur est propre, sont dites vespérales, parce que toute créature est reliée à la lumière éternelle, mais la nuit est ombre, de sorte que ce n'est pas sans se montrer savant que le poète de Cordoue a dit : "il vit sous quelle nuit gisait notre jour" et que cette connaissance des anges dans la parole et la lumière divine qui est la plus vraie et s'opère par l'essence, est dite matinale.

2270 Deus enim (teste augustino) res quas condidit sic administrat: ut eas proprios motus agere sinat. Dieu, en effet, au témoignage d'Augustin, administre les choses qu'il crée, de manière à leur permettre de mener leur propre mouvement.

2329 Vnde augustinus li. de ciui . dei .viii. Aether longe a terra alteque suspensus. Aer uero aetheri terræque contiguus. De là vient qu'Augustin, au livre 8 de la Cité de Dieu écrit : " L'éther est suspendu loin de la terre et en hauteur, mais l'air est contigu à la fois à l'éther et à la terre".