104 cum enim prudentius res sacras uario metri genere attigisset: et Iuuencus ac sedulius historiam euangelicam occupassent: historia apostolica: quia beatus lucas Exposuerat: nullum nacta uindicem omnibus patebat: donec in ius cessit Aratoris ex eius sinu prius euolans. Alors en effet que Prudence avait abordé les réalités sacrées en des mètres variés, et que Juvencus et Sédulius avaient pris pour sujet l’histoire de l’évangile, l’histoire apostolique que le bienheureux Luc avait racontée, n’ayant trouvé aucun auteur pour s’en occuper, était libre pour tous jusqu’au moment où, s’envolant d’abord de son sein, elle devint le bien d’Arator.
132 Vt enim ille facta et doctrinam et miracula Christi uersibus exposuit: ita Arator actus apostolorum et prædicationem: addita tamen mystica intelligentia enarrauit: Vtque ille quattuor euangeliographorum historiam: ita Arator Beati lucae ordinem et contextum usquequaque sequitur. De même en effet que celui-ci a voulu exposer en vers les actes, la doctrine et les miracles du Christ, de même Arator a raconté les actes des apôtres et leur prédication en y ajoutant une interprétation symbolique ; et de même que Juvencus a suivi l’histoire racontée par les quatre évangélistes, de même Arator suit en tout l’ordre et la construction du bienheureux Luc.
141 Id ipse mox dicet Versibus ispe canam: quos lucas rettulit actus: historiamque sequens Carmina uera loquar. C’est ce qu’il dira lui-même bientôt : "Versibus ispe canam : quos lucas rettulit actus : historiamque sequens Carmina uera loquar" (je chanterai donc en vers les actes que Luc a rapportés et, au fil de l'histoire, je dairai des poèmes véridiques).
143 Sunt enim duo libri tantum: qui eum ordinem sequuntur quem beatus lucas in actibus apostolorum seruauit. Il n’y a en effet que deux livres qui suivent l’ordre qu’a observé le bienheureux Luc dans les Actes des Apôtres.
287 (Esse reus) uidetur alludere ad historiam Euangelicam quamuis dissimulanter. siquidem in .xvii. capite narrat lucas: cum dominus ingrederetur quoddam castellum: occurrisse ei .x. uiros leprosos: qui procul clamantes aiebant Iesu præceptor miserere nostri . quos ut uidit salutifer dominus: ite inquit et ostendite uos sacerdotibus : dumque irent mundati sunt. Vnus autem ex ilis qui non erat iudæus sed alienigena et samaritanus: ut uidit subditæ curationis miraculum ad christum reuersus pedesque eius habiliter complexus: et gratus fuit: et uberes suo liberatori gratias ægit. reliqui nouem ingrati et accepti beneficium im memores numquam regessi abierunt. Dixit ergo iesus: nonne .x. mundati sunt? et nouem ubi sunt? non est inuentus qui rediret et daret gloriam deo: nisi hic alienigena? Et ait illi: surge. uade. quia fides tua te saluum fecit. (Esse reus) il semble faire allusion à un récit évangélique bien que ce soit de manière implicite. En effet Luc raconte au chapitre 17 que, comme le Seigneur entrait dans un village, accoururent vers lui dix lépreux, qui de loin criaient et disaient : "Jésus, maître, prends pitié de nous". Quand il les vit le Seigneur sauveur leur dit : "allez et montrez-vous aux prêtres". En y allant ils furent purifiés. Mais l’un d’eux, qui n’était pas juif mais étranger et samaritain, quand il vit le miracle de sa guérison soudaine revint vers le Christ et se jeta à ses pieds ; plein de reconnaissance, il remercia largement son libérateur. Mais les neuf autres étaient des ingrats et oublieux du bienfait qu’ils avaient reçu il s’en allèrent. Jésus lui dit donc : "les dix n’ont-ils pas été purifiés ? Et les neuf autres, où sont-ils ? Il ne s’en est donc pas trouvé un pour revenir et rendre gloire à Dieu sinon cet étranger ?". Et il lui dit "lève-toi et va, car ta foi t’a sauvé".
295 Dicit autem horum scilicet Petri et pauli: quia tametsi alii quoque apostoli fidem predicauerunt: de his praecipue contexit historiam beatus lucas: quem sequitur Arator. Or il dit horum ("de ceux-ci") évidemment Pierre et Paul, parce que, même si d’autres apôtres aussi ont prêché la foi, c’est autour de ces deux apôtres que le bienheureux Luc a bâti son récit. Or Arator le suit.
299 Miror autem uehementer cum arator hic polliceatur se narraturum actus apostolorum quos lucas rettulit: et ipsum Poema id narret non historiam Euangelicam: Et paulus diaconus idem affirmet: quid ita Platynae uenerit in mentem uiro alioquin doctissimo dicere in uita foelicis quarti: Aratorem uersibus hexametris Euangelia complexum fuisse. in foribus quis delinquit? Certe nos homines: quam in minimis labimur: qui caligamus in sole: qui maculas nostras præferimus quas aut incuria fundit aut humana parum cauet natura. Recte ergo illud dicitur: quandoque bonus dormitat homerus. sed a diuerticulo propositum repetamus. Mais je suis vraiment très étonné : alors qu’Arator promet qu’il racontera les actes des apôtres que Luc a rapportés et que c’est ce que le poème raconte et non le récit évangélique (et Paul Diacre affirme la même chose), qu’est-ce qui est passé par la tête de Platina, personnage par ailleurs très savant, de dire dans la vie de Félix IV qu’Arator avait embrassé en hexamètres le récit évangélique. "Aux portes qui se trompe ?" Evidemment nous, car nous sommes humains et, comme nous nous trompons sur de petites choses, nous sommes éblouis par le soleil et mettons en avant nos taches soit que cause notre incurie, soit dont la nature humaine ne tient pas assez compte. Ce mot est donc bien juste : "et parfois le bon Homère dort" ; mais quittons cette digression et revenons à notre propos.
301 Cum autem duo contineat historia apostolica a beato luca scripta simplicem actuum apostolicorum narrationem: quæ apellatur littera: et mysteria in historia sacra latentia: promittit Arator se utrunque expositurum: quod ante eum nemo: nisi perquam raro fecit sedulius: aut si alius fecit: nemo uno tractu totam historiam mysticis sensibus quasi floribus suaue olentibus adornauit ut Arator. Or, puisque il y a deux choses dans le récit apostolique écrit par le bienheureux Luc, la simple narration des actes des apôtres que l’on appelle lettre et les mystères cachés dans l’histoire sainte, Arator promet qu’il expliquera les deux, chose que personne avant lui n’a faite, sinon peut-être rarement Sédulius, ou peut-être un autre ; personne d’un seul trait n’a orné tout le récit de son sens mystique pour ainsi dire avec des fleurs au parfum délicieux, comme l’a fait Arator.
346 Arator: ut supra diximus: promisit se carminibus comprehensurum Actus apostolorum: quos Beatus Lucas scripsit. At Euangelium Lucæ et actus apostolorum eiusdem: sunt pene unum opus. Comme nous l’avons dit plus haut, Arator a promis d’embrasser dans son poème les Actes des Apôtres écrits par le bienheureux Luc. Mais l’évangile de Luc et les Actes des Apôtres forment pour ainsi dire un seul et même ouvrage.
347 Vbi enim desiit historia Euangelica: in qua diuus Lucas incipiens a præcursore Ioanne: Christi conceptionem: natiuitatem: opera miranda: prædicationem: mortem: resurrectionem ac postremo ascensionem exposuit: ibi incipit historia actuum apostolicorum. En effet là où s’arrête l’évangile dans lequel le divin Luc, commençant à Jean le précurseur, a exposé la conception du Christ, sa naissance, ses miracles, sa prédication, sa mort sa résurrection et pour finir son ascension, là commence le récit des Actes des Apôtres.
349 initium historiæ apostolicæ est hic locus: a quo Arator incipit sicut beatus lucas: in quo ait christum se discipulis præbuisse uiuum in multis argumentis post resurrectionem: atque ipsis apostolis per quadraginta dies crebro apparuisse: ipsosque apostolos dominum ascensurum interrogasse de regno hierusalem quibus angeli domino ascendente astiterunt: et cætera quæ diuus Lucas persequitur. Le début du récit des actes et le passage suivant (par lequel Arator commence comme le bienheureux Luc) : celui où il raconte que le Christ s’est montré vivant à ses disciples après sa résurrection en leur donnant de nombreuses preuves et qu’il est apparu aux apôtres eux-mêmes pendant quarante jours de façon fréquente, puis que les apôtres ont interrogé le Seigneur, alors qu’il allait monter aux cieux sur le royaume de Jérusalem, puis que des anges, une fois le Seigneur monté au ciel, se sont rendus présents à eux et tout le reste de la matière que suit le divin Luc.
349 initium historiæ apostolicæ est hic locus: a quo Arator incipit sicut beatus lucas: in quo ait christum se discipulis præbuisse uiuum in multis argumentis post resurrectionem: atque ipsis apostolis per quadraginta dies crebro apparuisse: ipsosque apostolos dominum ascensurum interrogasse de regno hierusalem quibus angeli domino ascendente astiterunt: et cætera quæ diuus Lucas persequitur. Le début du récit des actes et le passage suivant (par lequel Arator commence comme le bienheureux Luc) : celui où il raconte que le Christ s’est montré vivant à ses disciples après sa résurrection en leur donnant de nombreuses preuves et qu’il est apparu aux apôtres eux-mêmes pendant quarante jours de façon fréquente, puis que les apôtres ont interrogé le Seigneur, alors qu’il allait monter aux cieux sur le royaume de Jérusalem, puis que des anges, une fois le Seigneur monté au ciel, se sont rendus présents à eux et tout le reste de la matière que suit le divin Luc.
350 Diuidit autem historia actuum apostolorum in duo de triginta capita: usque ad .xii. caput: narrat beatus Lucas: quo pacto spiritus sanctus missus fuerit ad apostolos: ut illius uirtute recepta per donum linguarum eloquenter: et per fiduciam constanter Euangelium denunciarent. Luc divise le récit des Actes des Apôtres en vingt-huit chapitres : jusqu’au chapitre 12, le bienheureux Luc raconte de quelle manière l’Esprit saint fut envoyé aux apôtres pour que, par la force qu’ils avaient reçue de lui grâce au don des langues et s’appuyant sur la confiance qu’il leur avait donnée, ils annoncent avec constance l’évangile.
356 Merito igitur beati lucæ actus. apostolorum iunguntur historiæ Euangelicæ: lta enim unum alteri connectitur. ut unum corpus duo sermones conficiant. C’est donc à bon droit que les Actes des Apôtres du bienheureux Luc sont rattachés à son évangile ; ainsi, en effet, l’un est lié à l’autre de sorte que les deux textes constituent un seul corpus.
357 Primum (inquit beatus lucas) sermonem feci scilicet euangelicæ historiæ: de omnibus quæ cæpit Iesus facere et docere: In hoc sermone lex per christum data ostenditur. Pour commencer (dit le bienheureux Luc) "j’ai raconté" évidemment dans le récit évangélique "tout ce que Jésus a entrepris de faire et d’enseigner" ; dans ce récit, on montre la loi qui est donnée par l’intermédiaire du Christ.
358 At in secundo sermone lucæ id est in actibus apostolorum: ostenditur eadem lex Euangelica diuulgata per orbem terrarum regimine spiritus sancti et ministerio apostolorum aliorumque discipulorum. Mais dans le second récit de Luc, autrement dit les Actes des Apôtres, on montre la même loi évangélique se répandant par toute la terre sous la conduite de l’Esprit saint et par le ministère des apôtres et d’autres disciples.
364 Vnde probabile est ab spiritu sancto impulsum beatum lucam hunc secundum historiae apostolicæ sermonem priori sermoni historiæ Euangelicæ addidisse: quo pauli quoque extra numerum .xii. assumpti authoritas libro canonico firmata teneretur. Simul ut eius epistolae inter canonicas scripturas haberentur. canonicæ scripturæ testimonium habentes: quæ conuersionem eius et predicationem et miracula et singulares uirtutes plenissime exequitur. De ce fait, il est probable que c’est sous l’impulsion de l’Esprit saint que le bienheureux Luc a adjoint ce deuxième récit des Actes des Apôtres au premier récit de l’évangile, afin que l’autorité de Paul, qui a été ajouté aux Douze en surnuméraire, soit affermie dans un livre canonique et, de même, pour que ses lettres soient considérées au nombre des écrits canoniques, en ayant le témoignage de l’écriture canonique qui raconte sa conversion, sa prédication, ses miracles et ses vertus uniques avec force détails.
365 Potest esse etiam illa causa cur lucas actus scripserit: uel certe omnes esse possunt. quod apostolici numeri imminutio sanctæ scripturæ testimonio narrata est: ipsius etiam impletio canonico libro enarranda fuit. Il peut bien aussi se faire que ce soit là la cause qui fit écrire les Actes au bienheureux Luc, ou du moins toutes ces causes ont pu jouer : la diminution du nombre des apôtres a été racontée par le témoignage de la sainte Écriture et il fallait raconter dans un livre canonique le moment où ce nombre est de nouveau complété.
366 Illa etiam causa praæcipua est ut perfectus perfecti spiritus aduentus: perfecto apostolorum numero completus sancti canonis enunciaretur historia: utile et necessarium fuit hunc alterum sermonem actuum apostolorum a beato luca addi illi priori historiæ Euangelicæ. Cela est sans doute aussi la raison pour que la parfaite venue de l’Esprit parfait, accomplie lorsque le nombre des apôtres fut redevenu parfait, soit énoncé dans un récit du saint canon ; il a été utile et indispensable que ce second récit des Actes soit ajouté par le bienheureux Luc à son premier récit, l’évangile.
369 in hoc primo capite Continuat primum sermonem beati lucæ: secundo eiusdem lucæ sermoni: hoc est historiam Euangelicam historiae actuum apostolorum. Dans ce premier chapitre, il rattache le premier récit du bienheureux Luc au second récit du même Luc, à savoir le récit de l’évangile au récit des Actes des Apôtres.
369 in hoc primo capite Continuat primum sermonem beati lucæ: secundo eiusdem lucæ sermoni: hoc est historiam Euangelicam historiae actuum apostolorum. Dans ce premier chapitre, il rattache le premier récit du bienheureux Luc au second récit du même Luc, à savoir le récit de l’évangile au récit des Actes des Apôtres.
558 Sciendum est apostolos interrogasse dominum ut lucas ait: domine si in tempore hoc restitues regnum israel? reiecit christus interrogationem tanquam nimis crassam et ut ita loquar: carnalem: et adiecit: et eritis mihi testes in hierusalem: et in omni iudaea et samaria et usque ad ultimum terræ: Testes scilicet resurrectionis et cæterorum mirabilium quæ uidistis praedicando et diuulgando Euangelium usque in ultimum terræ. Il faut savoir que les apôtres interrogèrent le Seigneur comme le dit Luc : "Seigneur, est-ce dans ce temps que vas rétablir la royauté en Israël ?". Le Christ a rejeté cette question en considérant qu’elle était excessivement grossière et pour ainsi dire charnelle : "et vous serez mes témoins à Jérusalem et dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre" ; évidemment témoins de sa résurrection et de tous les autres miracles que vous avez vus en prêchant et en répandant l’Evangile jusqu’au bout de la terre.
566 (Miracula rerum) duæ in christo naturæ sunt diuina et humana. diuinitas christi non poterat uideri oculis mortalibus. at humanitas: apostolorum oculis et sensibus percepta est. Vnde lucas in fine Euangelii dicit dominum dixisse discipulis: palpate et uidete: quia spiritus carnem et ossa non habet: sicut me uidetis habere. (Miracula rerum) il y a dans le Christ deux natures, la nature divine et la nature humaine. La divinité du Christ ne pouvait être vue par des yeux mortels, mais l’humanité a été perçue par les yeux et les sens des apôtres. C’est pourquoi Luc, à la fin de l’évangile, dit que le Seigneur dit aux disciples : "touchez et voyez car un esprit n’a ni chair ni os comme vous constatez que j’en ai".
569 Se quoque christus esse eundem qui passus fuerat discipulis ostendit per opera uitæ altricis cum manducauit cum discipulis ut narrat lucas: obtulerunt inquit ei partem piscis assi et fauum mellis et cum manducasset coram eis sumens reliquias dedit eis. Le Christ montra à ses disciples qu’il était le même que celui qui avait souffert, en utilisant l’action de se nourrir quand il mangea avec ses disciples comme le raconte Luc : "ils lui offrirent un morceau de poisson grillé et un rayon de miel et comme il les avait mangé devant eux, prenant ce qu’il restait il le leur donna".
571 Intellectus autem apertum argumentum erat disputare cum illis de scripturis ut Lucas in ultimo capite narrat. Quant à son intelligence, il y en a une preuve évidente dans le fait qu’il discutait avec eux des Écritures comme Luc le raconte dans son dernier chapitre.
573 talia ergo argumenta et signa simul collata fidem certissimam apostolis fecerunt eundem esse illum hominem qui crucifixus fuisset: et qui resurgens secum loqueretur: adiuncta tamen (ut diuus thomas in. iii. parte ait) angelorum reuelatione et testimonio scripturarum: quarum sensus christus discipulis aperuit ut lucas in Euangelio author est. Vnde dixit dominus discipulis o stulti et tardi corde ad credendum in omnibus quae locuti sunt prophetæ. Donc de telles preuves et de tels signes une fois mis ensemble rendirent pour les apôtres absolument certaine la foi qu’il s’agissait bien du même homme que celui qui avait été crucifié, et qui, ressuscité, s’entretenait avec eux, quand s’y furent ajoutés cependant (comme le dit le divin Thomas dans la Secunda) la révélation des anges et le témoignage des Écritures, dont le Christ ouvrit le sens aux disciples comme l’atteste Luc dans son évangile : "alors le Seigneur dit aux disciples : ‘ô cœurs sans intelligence et lents à croire dans tout ce qu’on dit les prophètes’".
610 (Coelum petiturus.) dominus ascensurus in coelum in die quadragesimo post resurrectionenm id est in die assumptionis apparuit discipulis in ciuitate hierusalem: Eduxit autem christus discipulos extra ciuitatem in bethaniam: quæ uilla est in latere montis oliueti iam ascensurus in coelum ut narrat lucas in fine Euangelii: et ita prætermissis omnibus: quae per quadraginta dies gesta sunt: primo resurrectionis diei tacite coniungit nouissimum quo in coelum assumptus est. (Coelum petiturus.) le Seigneur qui allait monter au ciel le quarantième jour après sa résurrection autrement dit le jour de l’Ascension apparut à ses disciples dans la cité de Jérusalem. Et le Christ conduisait ses disciples hors de la cité à Béthanie (cette ville est sur le flanc du Mont des Oliviers), étant désormais sur le point de monter au ciel comme Luc le raconte à la fin de son évangile, et ainsi, après avoir passé sous silence tout ce qu’il a fait pendant ces quarante jours, il rapproche implicitement du premier jour de la résurrection le dernier dans lequel il est monté au ciel.
668 (Discipulos) altus stupor id est profunda admiratio tenet discipulos. quibus scilicet discipulis admirantibus domini ascensionem: uiri id est angeli in specie uirorum: perspicui id est clari uel propter uestes albas ut ait lucas in . i. capi. actuum. habebant enim angeli illi duo qui astiterunt apostolis intuentibus in coelum: uestes albas. (Discipulos) altus stupor autrement dit une profonde admiration s’empare des disciples ; tandis que ces disciples évidemment sont en admiration devant l’ascension du Seigneur, uiri ("des hommes"), autrement dit des anges sous forme d’hommes, perspicui ("de lumière") autrement dit brillants par exemple à cause de leurs vêtements blancs, comme le dit Luc en Ac. 1. En effet les deux anges qui se tenaient près des apôtres qui regardaient vers le ciel avaient des vêtements blancs.
671 Verum non mireris poetam non exprimere uerba angelorum quia uulgatissima sunt et in ore omnium a luca sumpta. dixere ergo scilicet uiri galilei quid statis aspicientes in cælum: hic Iesus qui assumptus est a uobis in coelum: sic ueniet quemadmodum uidistis eum euntem in coelum. Vraiment il n’y a pas lieu de s’étonner que le poète n’expose pas les paroles des anges car elles sont extrêmement connues et dans la bouche de tous, telles qu’on les trouve dans Luc. Ils dirent donc évidemment "hommes de Galilée, que restez-vous à regarder vers le ciel ; ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous reviendra de la même manière que vous l’avez vu partir vers le ciel".
694 dicit enim beatus lucas: et nubes suscepit: eum scilicet christum. ab oculis eorum. assumptus est autem christus in coelum a tota trinitate: quae in omnibus effectis praecipua causa est: et a se ipso: cum corpus gloriosum suae animae unde quaque obtemperet ac sit morigerum: et a nube praestante famulatum domino suo et creatori. Le bienheureux Luc dit en effet "et une nuée l’enveloppa", évidemment le Christ, "et le déroba à leurs yeux" ; le Christ fut conduit dans le ciel à la fois par toute la Trinité qui, dans tous ces effets est la cause principale, et par lui-même, puisque son corps glorieux obéit en tout à son âme et lui est soumis ; et enfin par la nuée qui offrit son service à son Seigneur et créateur.
696 nam ut narrat beatus lucas: posteaquam apostoli uerba angelorum audiuerunt: in hierusalem reuersi sunt a monte oliueti: qui mons distabat ab urbe itinere unius sabbati id est mille passibus. De fait, comme le raconte le bienheureux Luc, quand les apôtres eurent entendu les paroles des anges, ils revinrent du Mont des Oliviers à Jérusalem, et ce mont était distant de la ville de la longueur d’un chemin de sabbat, autrement dit mille pas.
704 Et caue ne putes Aratorem dicere: rediisse apostolos in hierusalem in sabbato: cum dominus feria quinta id est in die iouis assumptus fuerit et in eadem die apostoli redierint: sed hoc dicitur a poeta ut ostendat quantum distabat oliuetum ab urbe: quia scilicet itinere unius sabbati: sicut lucas etiam ait: tunc reuersi sunt in hierusalem a monte qui uocatur oliueti: sabbati habens iter. Et veille bien à ne pas croire qu’Arator dise que les apôtres sont revenus à Jérusalem le jour du sabbat, alors que le Seigneur a été enlevé au ciel le cinquième jour autrement dit le jeudi et c’est le même jour que les apôtres revinrent, mais le poète dit cela pour montrer quelle était la distance entre le Mont des Oliviers et la ville, évidemment parce que c’est par le chemin d’un jour de sabbat, comme le dit également Luc : "alors ils s’en retournèrent à Jérusalem depuis le Mont que l’on appelle des Oliviers, en parcourant un chemin de sabbat".
708 sciendum apsotolos ipsos rediisse in hierusalem post admonitionem angelorum: et ascendisse in coenaculum ut narrat beatus lucas: in quo erat mater domini cum mulieribus quae ipsam comitabantur: et Iesum a galilea in hierusalem secutae fuerant religionis ac pietatis obsequio: Verum cum statim dominus fixus cruci fuisset: mulieres deiperam mariam postea non dereliquerunt. Il faut savoir que les apôtres eux-mêmes revinrent à Jérusalem après l’admonition des anges, et qu’ils montèrent dans le cénacle, comme le raconte le bienheureux Luc, dans lequel se trouvait la mère du Seigneur avec les femmes qui accompagnaient celle-ci, et qui avaient suivi Jésus de la Galilée à Jérusalem pour obéir aux règles de la religion et de la piété ; mais dès que le Seigneur eut été fixé à la croix, les femmes ne quittèrent pas Marie la mère de Dieu.
719 Debemus autem oculis uigilantibus perspicere id quod lucas in primo actuum capite: et Arator hic refert illle namque dixit apostolos reuersos fuisse in hierusalem: et omnes perseuerasse unanimiter in oratione cum mulieribus et maria matre lesu. Nous devons donc garder le regard en éveil pour bien voir ce que Luc en Ac. 1 et ici Arator rapportent : de fait, il dit que les apôtres sont revenus à Jérusalem et que tous ils ont unanimement persévété dans la prière avec les femmes et Marie la mère de Jésus.
723 Sed hic ambiguitas quaedam animum punget alicuius: qui percunctabitur numquid uirgo interfuerit assumptioni gloriosae filii sui: cum dicat beatus lucas apostolos redisse in hierusalem: et arator quoque eos narret uenisse in eum locum ubi erat mater domini. Mais, à ce point, une ambiguïté pourra piquer certain au vif et lui faire demander s’il est vrai que la vierge était présente à la glorieuse ascension de son fils, alors que le bienheureux Luc dit que les apôtres retournèrent à Jérusalem et qu’Arator aussi raconte qu’ils vinrent dans le lieu où se trouvait la mère du Seigneur.
841 Est autem notandum uerbum illud dum trahit. Nam petrus uocatur ut loannes narrat: semel statim post baptisma christi. Deinde iterum luca referente in magna captura piscium: ad quam uerbum illud Aratoris refertur: dum trahit et. c. Il faut en outre bien noter ces mots dum trahit ("tandis qu’il tirait le filet"). De fait, Pierre est appelé, selon le récit de Jean, immédiatement après le baptême du Christ. Ensuite, d’après la narration de Luc, cela se produit lors d’une grande séance de pêche c’est à cela que se rapporte le passage d’Arator dum trahit etc.
950 (Quibus igne.) Beatus Lucas capite. ii . factus est inquit repente de coelo sonus tanquam uehementis spiritus aduenientis : et repleuit totam domum: ubi erant sedentes: et apparuerunt illis dispartitae linguae tanquam ignis: seditque supra singulos eorum: et repleti sunt omnes spiritu sancto: et ceperunt loqui uariis linguis prout spiritus sanctus dabat eloqui illis. (Quibus igne.) Le bienheureux Luc au chapitre 2 écrit : "il se fit soudain venant du ciel un son comme quand vient un fort souffle de vent, et il emplit toute la maison où ils se tenaient, et apparurent sur eux des langues comme de feu qui se divisèrent, et l’une d’elles vint se poser sur chacun d’entre eux, et ils furent remplis de l’Esprit saint et ils commencèrent à parler en langues variées selon les paroles que leur donnait l’Esprit saint".
969 Hoc enim quod apostolos dixisse narrat beatus lucas: te praecipue qui praecipuus eras: retulisse uerisimillimum est. En effet ce que le bienheureux Luc raconte que dirent les apôtres, il est extrêmement vraisemblable que tu l’as dit principalement puisque tu étais le principal apôtre.
991 Nam beatus lucas descendit inquit spiritus sanctus sicut columba in ipsum. Qua dictione scilicet sicut: non naturae ueritatem sed similitudinem uidetur notare Euangeliographus. De fait, le bienheureux Luc déclare : "l’Esprit saint descendit sur lui comme une colombe", par le mot ‘comme’ évidemment l’évangéliste veut indiquer non pas une vérité de nature, mais une comparaison.
1052 Si ergo magister ueritatis uult me ardere igni spiritus diuini: et coelesti amore flagrare: ipse prius ardeat necesse est. Quod si ille iacet dormit: stertit: caret affectu et igne: auditor quoque frigescat necessum est has duas et ignis et columbae figuras uim spiritus sancti notantes Arator hic explicat: cum ait (Res maxima) id est maximum mysterium: cogit scilicet me ait Arator: non reticere diu id est diuturno tempore sed statim declarare et efari: quid sit id est quae causa sit: quod id est ob quam spiritus almus id est sanctus: his scilicet apostolis: datur scilicet in die pentecostes: in flamma id est in specie ignis et flammae ut diximus: et scilicet datur columba id est in columba hoc est in similitudine columbae: ab amne: scilicet fluuio iordanis: hoc est ab illo loco spiritus sanctus uisus est in figura columbae cum dominus batipzatus fuit ut Mattheus et Lucas narrant. Si donc le Maître de vérité veut que je brûle du feu de l’Esprit divin et que je m’enflamme d’amour pour le Ciel, il est inévitable qu’il soit le premier à brûler ; et si il est couché, s’il dort, s’il ronfle, s’il manque d’affect et de feu, l’auditeur aussi, c’est inévitable, restera froid. Arator explique ici les deux figures, feu et colombe, qui représentent la force de l’Esprit saint en disant (Res maxima) autrement dit un très grand mystère cogit ("oblige") évidemment moi, dit Arator, non reticere diu ("à ne pas taire plus longtemps") autrement dit longuement, mais au contraire à dire et divulguer tout de suite, quid sit ("ce qui fait") autrement dit quelle est la cause quod ("que") autrement dit pour laquelle spiritus almus ("l’Esprit nourricier") autrement dit saint his ("à ceux-ci") évidemment les apôtres datur ("est donné") évidemment le jour de Pentecôte in flamma ("en une flamme") autrement dit sous l’aspect du feu et de la flamme comme nous l’avons dit ; et évidemment il est donné columba ("en une colombe") autrement dit sous forme de colombe, autrement dit à l’image d’une colombe, ab amne ("dans les eaux") évidemment dans le Jourdain, autrement dit l’Esprit saint s’y montra sous la figure d’une colombe quand le Seigneur fut baptisé comme le racontent Matthieu et Luc.
1072 (Hos etiam. ) In. ii.capite narrat lucas nonnullos obstupuisse tam multiplicem in singulis apostolis locutionem. Aliquos uero impios scilicet et irreligiosos per irrisionem dixisse: quia musto pleni sunt isti. Et quamuis hi irrisores mentiebantur: cum dicerent apostolos esse ebrios: quos confutans petrus dixit non sicut uos existimatis: hi ebrii sunt. cum sit hora diei tertia quasi uellet dicere eos adhuc nihil edisse aut bibisse cum hora tertia nemo ederet biberetue: alia tamen ratione uerum dixerunt: id est typice intelligendo et mystice uerba eorum. quia non uino ueteri quod in nuptiis ecclesiae defecit: sed musto gratiae spiritualis erant iam pleni. Iam enim uinum nouum in utres nouos uenerat: cum apostoli non in literae uetustate sed in nouitate spiritus dei magnalia resonarent. (Hos etiam.) Au chapitre 2, Luc raconte que certains furent étonnés d’une telle abondance de langage dans la bouche de chaque apôtre, mais que d’autres, des impies et des gens sans religion, dirent par manière de moquerie "ceux-là sont pleins de vin doux" ; et, bien que ces moqueurs eussent menti quand ils disaient que les apôtres étaient ivres, et que Pierre les confondit en disant "ce n’est pas ce que vous croyez, ils ne sont pas ivres puisque ce n’est que la troisième heure", comme s’il voulait dire qu’ils n’avaient encore rien mangé ni bu, puisque personne ne mangeait ou buvait à la troisième heure, en prenant cependant les choses dans un autre sens, ils disaient vrai, autrement dit en comprenant leurs paroles comme un type et un symbole mystique ; car il n’étaient pas pleins du vin vieux qui fit défaut aux noces de l’Église, mais du vin doux de la grâce spirituelle. Désormais en effet le vin nouveau était venu dans les outres neuves, puisque les apôtres faisaient retentir les merveilles de Dieu non dans la vieillesse de la lettre, mais dans la nouveauté de l’Esprit de Dieu.
1076 Alludit autem poeta ad illud quod mattheus Marcus et Lucas salutiferum lesum dixisse commemorant: Non mittunt uinum nouum in utres ueteres: alioquin rumpuntur utres: et uinum effunditur: et utres pereunt sed uinum nouum in utres nouos mittunt: et ambo conseruantur. Quibus uerbis respondit Christus discipulis loannis dicentibus: Quare nos et pharisaei ieiunamus frequenter. discipuli autem tui non ieiunant? His ita per superbiam et calumniam interrogantibus cum multifariam satisfecisset Christus: addidit quoque illud: non solent homines mittere uinum nouum hoc est mustum: in utres ueteres id est non sunt discipuli mei et apostoli spirituali ieiunio apti. donec me assumpto spiritu sancto sint confirmati: et nouae uitae mysteria non sunt committenda mentibus nondum innouatis: alioquin rumpuntur utres id est rudes mentes hoc pati non possunt: et uinum effunditur hoc est ipsa doctrina nihil prodest. et utres pereunt id est mentes imbecillae pondere praeceptorum suffocantur. Le poète fait allusion à une parole que Matthieu, Marc et Luc rappellent dans la bouche de Jésus le Sauveur : "on ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres, autrement les outres se rompent et le vin se répand en même temps que les outres sont perdues ; on met le vin nouveau dans des outres neuves et tous deux se conservent". Par ces mots Jésus répondit aux disciples de Jean qui disaient : "Pourquoi les pharisiens et nous faisons-nous de fréquents jeûnes alors que tes disciples ne jeûnent pas ?". Ces gens l’interrogeaient, sous l’effet de leur orgueil et poussés à le calomnier, mais quand il leur eut rendu raison de multiples façons, le Christ ajouta aussi cela : "on ne met pas le vin nouveau" autrement dit le vin doux, "dans de vieilles outres", autrement dit mes disciples et apôtres ne sont pas propres au jeûne tant que je ne suis pas monté au Ciel et qu’ils n’ont pas été affermis par l’Esprit saint ; et il ne faut pas confier les mystères de la vie nouvelle à des esprits qui n’ont pas encore été renouvelés, autrement "les outres se rompent", autrement dit ces esprits encore novices ne peuvent le supporter "et le vin se répand", autrement dit la doctrine elle-même ne produit aucun profit, "et les outres se perdent", autrement dit ces intelligences faibles sont étouffées sous le poids des préceptes.
1104 Eorum autem quae a diuo Luca in secundo capite narrantur: nonnulla latius explicat poeta: quaedam arctius: aliqua etiam quae desperat tractata nitescere posse: relinquit. Parmi les éléments qui sont racontés par le divin Luc dans son chapitre 2, il en est que le poète développe plus largement, d’autres qu’il traite de manière plus resserrée, et d’autres enfin qu’il laisse de côté car il n’a aucun espoir de pouvoir leur donner de l’éclat en les traitant.
1119 Nam mortuos uelut e somno solutos fuisse ad uitam reuocatos a christo narrat matthaeus: ut cum filiam archisynagogi iam defletam parenti uiuam reddidit: ut cum (narrante luca) filium uiduae extra portam elatum multa turba comitante uitae munere donauit: ut postremo cum lazarum post quattuor dies iam sepultum et male olentem e sepulchro in quo iacebat erexit? De fait, que les morts, comme tirés du sommeil, furent rappelés à la vie par le Christ, Matthieu le raconte ; ainsi quand il rendit la fille du chef de la synagogue, dont on avait déjà déploré le décès, vivante à son père, et quand (dans le récit de Luc) il accorda le don de la vie au fils de la veuve qui avait été porté hors des portes de la ville avec un nombreux cortège, comme enfin quand il releva Lazare, quatre jours après ses funérailles et sentant déjà, du sépulcre dans lequel il gisait.
1203 (Multiplicat.) Redit ad historiam poeta: secundum beati lucae narrationem: qui in tertio capite actuum: Qui inquit receperunt sermones eius baptizati sunt: et appositae sunt in die illa animae circiter tria millia. Dicit autem Arator hunc numeum trium chiliadon fidei congruere quae trina est et una. (Multiplicat.) Le poète revient au récit en suivant ce que raconte Luc dans le troisième chapitre des Actes : "ceux qui accueillirent sa parole furent baptisés et, ce jour-là, ils s’adjoignirent environ trois mille âmes". Or Arator dit que ce nombre de trois milliers convient à la foi qui est à la fois trine et une.
1227 Non enim singulis aetatibus milleni anni respondent. si autem hieronymi supputationem consideramus non quarto sed sexto millenario christus missus est. nam declarans stridonensis doctor uerba illa diui lucae: in mense autem sexto missus est angelus gabriel: sicut inquit sexto mense missus est angelus in ciuitatem galileae: ita sexto millenario missus est christus. Verum quia saeculum (ut ait censorinus de die natali) quid sit adhuc ad subtile examinatum non est: cum alii putent saeculum esse quod graeci dicunt genean: orbem scilicet aetatis dum natura humana ad sementem reuertitur: alii ut heraclitus . v. et. xx. annorum spatium: alii .xxx. ut Zeno. alii uitam longissimam hominis: cuius quoque spatium apud authores euariat: nam Epigines .cxii. annis uitam longissimam constituit: Berosus autem .cvi. Herodotus. c. et .I. ut Arganthonii tartessiorum regis: ephorus longius procedit: qui tradit archadas dicere apud se reges antiquos aliquot: ad .ccc. uixisse annos. Huic spatio respondet et congruit illud herodiani in historia romanorum principum: qui ait ludos saeculares trium spatio aetatum solitos instaurari: ut tamen centenos singulis distribuamus aetatibus: quanquam politianus doctor olim meus: et (ut ego in quodam dixi carmine) antiquis cedens quia non sit in illis: putat codicem non esse emendatum. Horatius flaccus in carmine: quod de saecularibus ludis cantatum est: cx. annis saeculum designauit: Certus inquit unde nos decies per annos orbis ut cantus referatque ludos. quoniam igitur saeculi spatium ad uiuum nequit resecari propter authorum in eo uarietatem: uel cum censorino sentiamus: qui inquit nostri maiores: quod natura saeculum quantum esset exploratum non habebant: ad certum annorum modulum annorum .c. statuere: uel cum herodiano: qui .ccc. annorum saeculum statuit. et ad utranque significationem saeculi: aliter ac supra interpretati sumus: poteris sensum horum uersuum connectere: quanquam hic sensus non tam placet quam ille superior. En effet les millénaires ne correspondent pas à chacun de ces âges. Et, si nous considérons le comput de Jérôme, ce n’est pas dans le quatrième millénaire, mais dans le sixième, que le Christ a été envoyé. De fait, le docteur de Stridon, en expliquant les paroles du divin Luc "au sixième mois l’ange Gabriel fut envoyé", dit ceci : "comme ce fut au sixième mois que l’ange fut envoyé dans une cité de Galilée, de même c’est au sixième millénaire que le Christ fut envoyé". Mais nous n’avons pas (comme le dit Censorinus dans son ouvrage de Die natali) encore assez finement examiné ce que recouvre la notion de saeculum, puisque certains pensent que le siècle recoupe ce que les Grecs nomment γενεά (génération), évidemment un cycle temporel qui ramène la nature humaine à son origine, alors que d’autres, comme Héraclite, en font un espace de vingt-cinq ans, d’autres de trente, comme Zénon, d’autres encore de la plus longue durée possible d’une vie humaine, durée qui varie selon les auteurs. Ainsi Epigène fixe la durée maximale de la vie à cent douze ans, Bérose à cent six, Hérodote à cent un, comme cela fut le cas pour Arganthonios, roi de Tartesse ; Ephore en allonge la durée en rapportant ce qui se dit chez les Arcadiens, que quelques rois, chez eux, vécurent autour de trois cents ans. A cette durée correspond, en s’y accordant, ce passage d’Hérodien, dans l’Histoire des empereurs de Rome : il dit que les jeux séculaires étaient d’ordinaire célébrés à une distance de trois âges, à supposer cependant que nous donnions cent ans à chaque âge. Pourtant Politien, mon maître autrefois et (comme je l’ai dit dans un de mes poèmes) "ne le cédant aux Anciens que parce qu’il n’est pas de leur nombre", pense que le manuscrit ici est fautif. Horace Flaccus, dans son ode qui a été chantée pour les jeux séculaires, précise que le siècle compte cent dix ans "dix fois onze ans pour que nous revienne le temps des chants et des jeux". Ainsi donc, puisqu’on ne peut trancher dans le vif sur la durée du siècle, en raison de l’opinion divergente des auteurs à ce sujet, on peut soit suivre l’avis de Censorinus qui dit : "nos ancêtres n’étaient pas bien sûrs de la durée du siècle, ils la fixèrent, pour arriver à une certitude, à une mesure qui fait autour de cent ans", ou celui d’Hérodien, qui fixa le siècle à trois cents ans. Et, conformément à l’une ou l’autre des significations données au mot siècle, on pourra relier cela au sens des présents vers, en interprétant autrement que nous ne l’avons fait, bien que le sens que l’on obtient alors ne me plaît pas autant que celui que j’ai donné d’abord.
1234 (FVNDITVR INTEREA.) Cum in die pentecoste tres chiliades et tria millia hominum credidissent: et baptizati tot a petro essent: ut in secundo capite actuum narrauit diuus lucas: perseuerabant in doctrina apostolorum: omnes etiam qui credebant erant pariter: et habebant omnia communia: possessiones et substantias uendebant: et diuidebant illa omnibus prout cuique opus erat. (FVNDITVR INTEREA.) comme au jour de Pentecôte trois milliers, autrement dit trois mille personnes avaient cru et qu’autant avaient été baptisées par Pierre, comme le divin Luc l’a raconté au chapitre 2 des Actes, ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres et tous les croyants étaient égaux et il mettaient tout en commun, vendaient leurs biens et leurs fortunes et les partageaient à tous selon les besoins de chacun.
1470 (CLAVDVS ERAT.) Cum dominus fideles omnia inuicem communicantes quottidie augeret: petrus et Ioannes ut in. iii. capite narrat: Lucas : ascendebant in templum ad horam orationis nonam. (CLAVDVS ERAT) : comme le Seigneur augmentait chaque jour le nombre des fidèles qui mettaient tout en commun, Pierre et Jean, comme le raconte Luc en Actes 3, montaient au Temple vers la neuvième heure.
1491 Et generaliter est intelligenda sententia: quia scilicet læticia maxima ex magno moerore plaerumque redundat. ut exempli gratia: si diceremus illud christi apud lucam: nonne haec oportuit pati christum et ita intrare in gloriam suam? Et il faut comprendre cette sentence de manière générale, évidemment parce que la plus grande joie rejaillit la plupart du temps d’une grande tristesse, comme par exemple, si nous disions ce mot du Christ chez Luc : "ne fallait-il pas que le Christ souffre et ainsi entre dans sa gloire ?".
1493 Vnde loannes: gauisi inquit sunt discipuli uiso domino. Et Lucas adhuc inquit illis non credentibus et mirantibus præ gaudio . Ce qui fait dire à Jean : "les disciples se réjouirent en voyant le Seigneur", et Luc dit aussi :" ils n’y croyaient pas encore et s’étonnaient en étant pleins de joie".
1543 (stat facti manifesta.) quia exiliens claudus intrauit cum petro et loanne in templum ambulans et laudans deum. et uidit omnis populus eum ambulantem et laudantem deum. cognoscebant enim illum: quoniam ipse erat qui ob elemosynam sedebat ad speciosam portam ut ait lucas. (stat facti manifesta ("l'évidence de ce fait est assurée")) parce que le boiteux bondit et entra avec Pierre et Jean dans le Temple, en marchant et en louant Dieu, et "tout le peuple le vit marcher et louer Dieu ; car ils le connaissaient, puisque c'était celui-là même qui se tenait assis près de la Belle Porte pour mendier" comme le dit Luc.
1654 (Porticus Salomonis.) Currit inquit lucas omnis populus ad eos scilicet petrum et loannem: ad porticum salomonis stupentes. (Porticus Salomonis ("le Portique de Salomon")) : "tout le peuple", dit Luc "accourt vers eux", évidemment Pierre et Jean "près du Portique de Salomon, dans la stupéfaction".
1671 Multi autem eorum qui audierant uerbum: crediderunt. Et factus est teste luca: numerus uirorum fidelium quinque milia. Or beaucoup de ceux qui avaient entendu sa parole crurent, et, au témoignage de Luc, le nombre des fidèles (en ne comptant que les hommes) monta à cinq mille.
1715 Nam ut inquit lucas omnes clarificabant factum illud mirabile: quod ne diuulgaretur: iudæi edicebant. De fait, comme le dit Luc, tous rendaient gloire à Dieu pour cet acte admirable que les Juifs avaient interdit de divulguer.
1774 Hortatur igitur his similitudinibus Arator gentem iudaicam: ut sese inserat ecclesiæ Christi: et ut uelit considerare quomodo oleaster: et spinæ ecclesiæ insertæ: naturam in foecundam exuentes fructiferam ac nouam induerunt: ut et ipsa synagoga idem faciens: sterilis esse desinat: alioquin dicet dominus: ut utar lucæ uerbis: ad cultorem uineæ: ecce anni. iii. sunt ex quo uenio quærens fructum in ficulnea hac: et non inuenio. Succide ergo illam. Vt quid etiam terram occupat? Arator exhorte donc, à travers ces comparaisons, la nation juive à se laisser greffer sur l'Eglise du Christ, et à bien vouloir considérer comment l'oléastre et les épines de l'Eglise, une fois greffées, ont quitté leur nature pour en prendre une nouvelle qui soit féconde et donne du fruit, de sorte que la Synagogue, elle-même, si elle faisait pareil, cesserait d'être stérile ; autrement le Seigneur dira, pour reprendre les paroles de Luc au cultivateur de la vigne : "Voici trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier sans en trouver ; coupe-le donc car pourquoi épuise-t-il la terre ?".
1789 (POSTQUAM MIRA SALVS.) Dimissi petrus et loannes a sacerdotibus et magistratibus templi: uenerunt ad reliquos apostolos et fideles: et ut narrat lucas annunciauerunt eis minas seniorum et magistratuum. qui cum audissent: unanimiter leuauerant uocem suam ad dominum et cum orassent: motus est locus in quo erant congregati, perceperunt autem fideles indicium exauditæ orationis terræ motu: ut scirent corda terrena sibi cessura: sub quorum pedibus spiritu adueniente: terra est concussa pauore. (POSTQUAM MlRA SALVS.) ("après qu'un merveilleux salut") Pierre et Jean, une fois renvoyés par les prêtres et les magistrats du Temple, vinrent trouver les autres apôtres et croyants et, ainsi que le raconte Luc, ils leur annoncèrent les menaces des anciens et des magistrats ; quand ils les eurent entendus unanimement ils élevèrent leur voix vers le Seigneur et comme ils avaient prié, le lieu dans lequel ils étaient rassemblés fut ébranlé, et les croyants perçurent un signe que leur prière avait été exaucée par ce tremblement de terre, afin qu'ils sachent que les entrailles de la terre cédaient devant ceux sous les pieds desquels, avec la venue de l'Esprit, la terre fut ébranlée de peur.